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« Attention... aux maladies vénériennes » : différence entre les versions
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''Syphilis'' | |||
L'intervention des pouvoirs publics par la surveillance sanitaire des marins, des soldats et des prostituées, ainsi que les progrès de la médecine, par l'introduction de nouvelles thérapeutiques comme l'iodure de potassium, et ceux de l'hygiène, font sensiblement reculer toutes les maladies vénériennes entre le milieu du siècle et 1880; | Au milieu du XIXe siècle, la syphilis atteint sa plus grande extension dans les pays européens, alors que la transmission de plusieurs maladies vénériennes à la fois est de plus en plus fréquente. L'intervention des pouvoirs publics par la surveillance sanitaire des marins, des soldats et des prostituées, ainsi que les progrès de la médecine, par l'introduction de nouvelles thérapeutiques comme l'iodure de potassium, et ceux de l'hygiène, font sensiblement reculer toutes les maladies vénériennes entre le milieu du siècle et 1880;. Dans les deux ou trois décennies suivantes, selon les pays, les progrès de la prostitution clandestine anéantissent presque ces efforts et il faut, au début du XXe siècle de nouveaux investissements publics et de nouvelles mesures pour voir un nouveau recul des maladies vénériennes. Dans presque tous les pays développés, après un doublement provisoire des contaminés à l'occasion des deux guerres mondiales, l'arrivée des traitements par sulfamides puis par antibiotiques a donné l'espoir de pouvoir éradiquer, sinon toutes, du moins les plus graves des MST. | ||
Dans | Alors que l’Europe de l’après-Deuxième Guerre mondiale, en pleine reconstruction, oublie la terreur qu’inspirait autrefois la syphilis, quelques spécialistes s’inquiètent du fait que la maladie n’a pas entièrement disparu. Dans un ouvrage paru en 1958, ''Les maladies vénériennes : danger actuel et permanent'', le Dr Sicard de Plauzoles (1872-1968), directeur de l’Institut Alfred Fournier, dénonce le revirement de ses collègues qui considèrent que la syphilis est désormais une maladie bénigne. « Un grand nombre de médecins éminents sous-estiment aujourd’hui l’importance du péril vénérien », écrit-il avant d’ajouter, « pourtant il reste actuel et permanent ». Si Plauzoles reconnaît une diminution spectaculaire des cas recensés entre 1946 (15 454 cas), 1948 (8 681 cas) et 1952 (1'874 cas), à partir de 1953, il constate que la baisse s’interrompt. La maladie, loin de s’éteindre, subsiste sous forme de cas résiduels en nombre à peu près stable, et parfois même en augmentation d’une année à l’autre (1955 et 1956, « surtout importante dans le département de la Seine ») . À ses yeux, l’optimisme thérapeutique et la démobilisation face à la syphilis sont donc dangereux. Aussi conclut-il : « La régression de la syphilis n’est pas aussi importante qu’il semble : la syphilis tend à devenir stationnaire et même à retrouver une nouvelle marche ascensionnelle ». Un propos qu’il insère dans la perspective d’une lutte mondiale contre la maladie, rappelant que l’OMS recense dans le monde plus de vingt millions de nouvelles contaminations et deux millions de morts par an. | ||
Les chiffres de Sicard de Plauzoles se limitent à la France des années 1950. Néanmoins, le constat plus général d’une confiance excessive dans la disparition de la maladie, d’une inattention aux cas résiduels et finalement d’une surprise face à leur nouvelle augmentation, s’observe ailleurs et à d’autres époques. Optimisme thérapeutique, démobilisation prophylactique et court-circuit pharmaco-technique transforment les schémas de l’infection. Celle-ci, cependant, se déplace des groupes à risque (travailleurs du sexe, etc.) vers la population générale, avec l’apparition de catégories telles les « ami(e)s de passage » (comme il est évoqué dans l'émission). Depuis 1965, les contaminations ont triplé ou quadruplé durant une dizaine d'années puis, après une stagnation de 1975 à 1985, régressent à nouveau, mais très lentement, depuis 1986. | |||
''Blennorragie'' | ''Blennorragie'' | ||
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Cf. Jean-Noël Biraben, "Le rôle des maladies sexuellement transmissibles en démographie historique", ''Population'', année 1996, pp.1041-1057. | Cf. Jean-Noël Biraben, "Le rôle des maladies sexuellement transmissibles en démographie historique", ''Population'', année 1996, pp.1041-1057. | ||
''L'enquête de Degos et Duperrat'' | |||
Dans un article paru en 1987, le Dr. Henri Péquignot revient sur la période des années 50 pendant laquelle les services sociaux d'épidémiologie découvrent une "réalité tout à fait nouvelle". A cette occasion il cite les travaux statistiques du Dr. Degos qui les évoque lui-même dans le film Attention... aux maladies vénriennes (11:39-12:29) : "C'est que les moeurs sexuelles ont changé : les contaminations ne sont plus celles d'autrefois, des chaînes de liaison qu'on pouvait suivre. Deux phénomènes, surout, son signalés : la montée de l'homosexualité (pour la syphilis à Saint-Louis, selon Degos ou Duperrat, de 2% de cas avant la guerre à 30 % dans les années 1950), et la contamination non professionnelle, l'amie remplaçant la professionnelle tarifée. Cette amie "gratuite" s'appelle légion et ne peut être retrouvée ; elle ne prend aucune des précautions élémentaires que prenait la professionnelle. Les service sociaux découvrent les premiers cette novation de la sexualité qu'est la promiscuité sexuelle, les sexualités de groupe. Par ailleurs, la mobilité géographique du malade effectif ou potentiel, de ses contaminants ou de ses futur(e)s contaminé(e)s, défie tout travail social." (- « L'éclipse des maladies vénriennes en France » par Henri Péquignot dans Jean-Pierre Bardet, Patrice Bourdelais (dir.), ''Peurs et terreurs face à la contagion'', Saint-Amand-Montrond, 1988, p. 360.) | |||
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Pierre Desgraupes parle à la caméra, tenant ses lunettes à la main. "Ce soir, nous sommes installés à l'Hôpital Saint-Louis à Paris, le plus grand centre de traitement des maladies de la peau et des maladies vénériennes." Or c'est justement des maladies vénériennes dont il va être question, ajoute Desgraupes. Élargissement du cadre qui montre Desgraupes installé face à un médecin dont le profil est en amorce bord cadre gauche. Il sera ensuite filmé en contre champ de Desgraupes, ou bien de nouveau vis-à-vis de lui. Le journaliste ne le présente pas, mais il s'agit de Robert Degos, dermatologue, chef de service de dermatologie à partir de 1951 à l'Hôpital Saint-Louis, créateur de la Chaire des maladies de la peau et de la syphilis. À la demande de Desgraupes, le médecin définit les maladies vénériennes : regroupant les maladies liées à l'acte sexuel, elles comprennent la syphilis, la blennorragie qui continuent de sévir. Souvent confondues dans l'esprit du public,elles sont néanmoins différentes l'une de l'autre "aussi bien par leur agent infectieux que par leurs conséquences." | Pierre Desgraupes parle à la caméra, tenant ses lunettes à la main. "Ce soir, nous sommes installés à l'Hôpital Saint-Louis à Paris, le plus grand centre de traitement des maladies de la peau et des maladies vénériennes." Or c'est justement des maladies vénériennes dont il va être question, ajoute Desgraupes. Élargissement du cadre qui montre Desgraupes installé face à un médecin dont le profil est en amorce bord cadre gauche. Il sera ensuite filmé en contre champ de Desgraupes, ou bien de nouveau vis-à-vis de lui. Le journaliste ne le présente pas, mais il s'agit de Robert Degos, dermatologue, chef de service de dermatologie à partir de 1951 à l'Hôpital Saint-Louis, créateur de la Chaire des maladies de la peau et de la syphilis. À la demande de Desgraupes, le médecin définit les maladies vénériennes : regroupant les maladies liées à l'acte sexuel, elles comprennent la syphilis, la blennorragie qui continuent de sévir. Souvent confondues dans l'esprit du public,elles sont néanmoins différentes l'une de l'autre "aussi bien par leur agent infectieux que par leurs conséquences." | ||
Desgraupes | Desgraupes donne un tour dramatique à l'émission pour mobiliser l'attention du public. S'il sait les raisons essentielles pour lesquelles ce sujet y est abordé, il demande au médecin de les énoncer. Le médecin s'exécute : "La recrudescence des maladies vénériennes a pris une telle importance qu'elle pose un problème à la fois médical, social et épidémiologique dont tout le monde doit être informé." Desgraupes oriente son regard vers l'autre côté de la pièce où se tient un autre médecin qui n'est pas non plus nommé. Il s'agit probablement de René Touraine, devenu en 1958 collaborateur en tant que chef de clinique de Robert Degos à l'Hôpital Saint-Louis, nommé médecin des Hôpitaux en 1961. Desgraupes lui demande son avis sur les idées fausses générées par le sujet. Touraine distingue les sujets de la génération d'après-guerre, la "génération de la pénicilline", qui souffrent d'un manque d'informations, des sujets de la génération précédente pour laquelle le mot "syphilis" est "lourd de significations : la syphilis est encore la 'maladie punition', qui laisse une tare héréditaire qui se transmet de génération en génération et qui demande des traitements prolongés". Le Dr Touraine estime que ces idées doivent être aujourd'hui revues. Ainsi l'émission, par son introduction, entre dans un double mouvement : alerter (ça continue d'exister) -relativiser (on soigne mieux qu'avant). Il n'est sans doute pas fortuit que ce soit l'aîné (Degos) qui alerte, en tant qu'autorité supérieure, et le plus jeune (Touraine) qui relativise, symbolisant la génération de la nouvelle médecine. | ||
'''Documenter la recrudescence : l'évolution de l'encadrement de la prostitution''' | '''Documenter la recrudescence : l'évolution de l'encadrement de la prostitution''' | ||
À Desgraupes qui l'interroge sur la fréquence de la maladie, Degos répond qu'il ne peut répondre qu'à partir des statistiques qui relèvent les manifestations de syphilis. Gros plan sur un graphique dessiné sur support papier posé sur le rebord de l'armoire murale. Il est caractéristique de l'émission d'insérer dans le champ dévolu au tournage des entretiens les illustrations graphiques qui auraient pu faire l'objet de la fabrication d'une séquence en animation. Le graphique montre des courbes correspondant aux années 1954-1969, dessinant une ascension avec une pointe à l'année 1964. "Mais actuellement, cette courbe reste encore très élevée." Degos cherche un second graphique qu'il pose sur le premier. Il décrit l'évolution des fréquences depuis les années 1920. La courbe, si elle descend jusqu'en 1940, remonte pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1947-1949, la chute brutale de la courbe laisse penser que les maladies vénériennes sont vaincues, or elle remonte à partir de 1957. Desgraupes observe : "ainsi, on remonte aussi haut que l'endroit d'où l'on était parti." Degos approuve en ajoutant : "Actuellement, nous remontons année par année au niveau des années antérieures. En 1965, nos retrouvons 1933, en 1966, nous retrouvons 1932. Nous revenons en arrière." Degos ajoute que la pénicilline a permis d'enrayer l'épidémie de la Guerre, mais | À Desgraupes qui l'interroge sur la fréquence de la maladie, Degos répond qu'il ne peut répondre qu'à partir des statistiques qui relèvent les manifestations de syphilis. Gros plan sur un graphique dessiné sur support papier posé sur le rebord de l'armoire murale. Il est caractéristique de l'émission d'insérer dans le champ dévolu au tournage des entretiens les illustrations graphiques qui auraient pu faire l'objet de la fabrication d'une séquence en animation. Le graphique montre des courbes correspondant aux années 1954-1969, dessinant une ascension avec une pointe à l'année 1964. "Mais actuellement, cette courbe reste encore très élevée." Degos cherche un second graphique qu'il pose sur le premier. Il décrit l'évolution des fréquences depuis les années 1920. La courbe, si elle descend jusqu'en 1940, remonte pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1947-1949, la chute brutale de la courbe laisse penser que les maladies vénériennes sont vaincues, or elle remonte à partir de 1957. Desgraupes observe : "ainsi, on remonte aussi haut que l'endroit d'où l'on était parti." Degos approuve en ajoutant : "Actuellement, nous remontons année par année au niveau des années antérieures. En 1965, nos retrouvons 1933, en 1966, nous retrouvons 1932. Nous revenons en arrière." Degos ajoute que la pénicilline a permis d'enrayer l'épidémie de la Guerre, mais le recours aux antibiotiques ne suffit pas. Si la pénicilline a conservé toute son action, il faut expliquer cette recrudescence, observée dans tout le territoire mais aussi partout en Europe, par différentes causes : l’insouciance des malades, les vacances ou le tourisme comme contextes de contamination, la prise en compte des difficultés des enquêtes épidémiologiques, la « liberté des mœurs » et l’« évolution de la vie sexuelle ». Pour Degos, les méthodes contraceptives peuvent contribuer à cette recrudescence en favorisant des rapports ponctuels par des rencontres avec des "amies de passage après le bal ou le cinéma" : Degos oriente le processus de la transmission en faisant des femmes les agentes de contamination et des hommes les contaminés - qui contaminent à leur tour. Il va plus loin en suggérant que l’abandon du contrôle médical de la prostitution à partir du décret de 1960 favorise également la reprise de la transmission. (11:39) | ||
'''La part importante des contaminations homosexuelles''' | '''La part importante des contaminations homosexuelles''' | ||
Le Dr Degos présente ensuite une troisième courbe, selon lui "très intéressante" qui concerne les personnes homosexuelles atteintes par les maladies vénériennes. Avant la Seconde Guerre mondiale, "les contaminations masculines par homosexualité ne dépassaient pas 1% et certaines années, atteignaient presque le zéro." Or cette courbe commence à augmenter à partir de 1952. "À Saint-Louis, on est arrivé à 28% de contamination masculine par homosexualité." Desgraupes conclut que c'est plus que la contamination par les prostituées dans la même année. Même si l'identification d'un foyer particulier a peut-être influencé la courbe, il n'en reste pas moins que les contaminations par homosexualité font, les années suivantes, 10% au moins des contaminations totales. Il est difficile de comprendre précisément pourquoi le Dr Degos insiste sur ces différents faits (l'évolution du statut de la prostitution, la part de la contamination par liaison homosexuelle). | Le Dr Degos présente ensuite une troisième courbe, selon lui "très intéressante" qui concerne les personnes homosexuelles atteintes par les maladies vénériennes. Avant la Seconde Guerre mondiale, "les contaminations masculines par homosexualité ne dépassaient pas 1% et certaines années, atteignaient presque le zéro." Or cette courbe commence à augmenter à partir de 1952. "À Saint-Louis, on est arrivé à 28% de contamination masculine par homosexualité." Desgraupes conclut que c'est plus que la contamination par les prostituées dans la même année. Même si l'identification d'un foyer particulier a peut-être influencé la courbe, il n'en reste pas moins que les contaminations par homosexualité font, les années suivantes, 10% au moins des contaminations totales. Il est difficile de comprendre précisément pourquoi le Dr Degos insiste sur ces différents faits (l'évolution du statut de la prostitution, la part de la contamination par liaison homosexuelle). Tout au long de ses explications, le Dr Degos ne se départit pas d'un sourire amusé qui suggère qu'il pourrait en dire plus long qu'il ne le fait. (12:29) | ||
'''Expliquer les maladies vénériennes pour les limiter''' | '''Expliquer les maladies vénériennes pour les limiter''' | ||
Pierre Desgraupes rappelle qu'une des causes la recrudescence des maladies est l'insuffisance d'informations à leur sujet. C'est pourquoi la séquence à venir est centrée sur ces informations devenues nécessaires. Petit silence de Desgraupes, puis : "C'est un sujet délicat à aborder à la télévision, bien sûr, mais nous n'avons pas hésité à le faire pour que cette émission soit socialement utile." Desgraupes se tourne vers un autre médecin, | Pierre Desgraupes rappelle qu'une des causes la recrudescence des maladies est l'insuffisance d'informations à leur sujet. C'est pourquoi la séquence à venir est centrée sur ces informations devenues nécessaires. Petit silence de Desgraupes, puis : "C'est un sujet délicat à aborder à la télévision, bien sûr, mais nous n'avons pas hésité à le faire pour que cette émission soit socialement utile." Desgraupes se tourne vers un autre médecin, qui lui non plus n'est pas nommé, pour qu'il décrive les signes cliniques des maladies concernées. Gros plan sur le médecin qui se lance dans son exposé. | ||
La syphilis, explique-t-il, est une maladie qui évolue en trois stades. Le stade primaire, de localisation. Incubation latente de 3 semaines qui peut se prolonger si le malade a pris, pour d'autres raisons que la maladie, des antibiotiques. La manifestation est le chancre syphilitique, érosion "orbiculaire", indurée, qui "siège sur les organes génitaux dans 95% des cas". Desgraupes interrompt : "Nous ne pouvons pas montrer d'organes génitaux...", le médecin poursuit : "Alors nous vous montrerons des localisations | La syphilis, explique-t-il, est une maladie qui évolue en trois stades. Le stade primaire, de localisation. Incubation latente de 3 semaines qui peut se prolonger si le malade a pris, pour d'autres raisons que la maladie, des antibiotiques. La manifestation est le chancre syphilitique, érosion "orbiculaire", indurée, qui "siège sur les organes génitaux dans 95% des cas". Desgraupes interrompt : "Nous ne pouvons pas montrer d'organes génitaux...", le médecin poursuit : "Alors nous vous montrerons des localisations extra-génitales, en particulier des chancres de la lèvre". Suivent des clichés cliniques montrant des visages aux lèvres affligées de chancres, avec des commentaires associés donnés par le Pr Touraine dont on reconnaît la voix (probablement, étant donné la qualité sonore différente, à l'occasion d'un autre tournage) : "On voit bien la tuméfaction de la joue qui correspond à l'augmentation du ganglion". Suit un cliché de chancre situé au-dessus de l'appareil génital, où la naissance de la verge est visible bord cadre bas. Son insertion après les clichés des visages semble résulter d'une stratégie de mise en scène. Préparé par les clichés qui le précèdent, montrant comme promis par le médecin des "chancres de la lèvre", ce dernier cliché est plus éloquent, quitte à brutaliser la présentation au mépris des précautions avancées par Desgraupes et des assurances du médecin. Le déroulement de cette séquence prend donc le spectateur par surprise, le confrontant à la l'exposition de la zone génitale atteinte. | ||
Le stade secondaire : diffusion de la maladie dans tout l'organisme, avec dissémination des lésions sur la peau. Cliché clinique montrant la nuque et la partie supérieure du dos, puis l'épaule et la partie supérieure du torse d'un patient. La peau est parcourue de taches de roséole syphilitique. Seconde éruption de syphilis secondaire : cette fois, c'est le bas d'un visage, la paume d'une main (cliché du générique), la plante des pieds, les muqueuses buccales, la langue, qui sont montrés. Il s'agit de lésions qui prennent des "dessins bien réguliers, des espèces d'arcs de cercle ", de marques "indolentes" qui, sur la peau, prennent l'aspect d'un eczéma passager. Le dernier cliché montrant une tempe dégarnie témoigne d'une "perte de cheveux syphilitique." Ici, il est à remarquer que l'émission procède à une explicitation fouillée des images. La démarche à l'intention du téléspectateur est : je vous fais comprendre exactement ce que je vous montre, je ne m'en tiens pas à la production d'une image-document supposée crédibiliser mon propos de surplomb. | Le stade secondaire : diffusion de la maladie dans tout l'organisme, avec dissémination des lésions sur la peau. Cliché clinique montrant la nuque et la partie supérieure du dos, puis l'épaule et la partie supérieure du torse d'un patient. La peau est parcourue de taches de roséole syphilitique. Seconde éruption de syphilis secondaire : cette fois, c'est le bas d'un visage, la paume d'une main (cliché du générique), la plante des pieds, les muqueuses buccales, la langue, qui sont montrés. Il s'agit de lésions qui prennent des "dessins bien réguliers, des espèces d'arcs de cercle ", de marques "indolentes" qui, sur la peau, prennent l'aspect d'un eczéma passager. Le dernier cliché montrant une tempe dégarnie témoigne d'une "perte de cheveux syphilitique." Ici, il est à remarquer que l'émission procède à une explicitation fouillée des images. La démarche à l'intention du téléspectateur est : je vous fais comprendre exactement ce que je vous montre, je ne m'en tiens pas à la production d'une image-document supposée crédibiliser mon propos de surplomb. | ||
Pour le stade tertiaire, c'est toujours le Pr Touraine qui est interrogé. Il n'y a alors plus de clichés cliniques, il est tout le temps à l'image, montré en gros plan avec quelques plans de coupe sur Desgraupes quand celui-ci le relance. Alors que le patient ne manifeste plus aucun signe d'atteinte syphilitique, les prises de sang dont il est l'objet, par exemple pendant une transfusion ou un bilan général, montrent que la maladie se poursuit. Ces examens peuvent pister une recrudescence, ainsi, les prises | Pour le stade tertiaire, c'est toujours le Pr Touraine qui est interrogé. Il n'y a alors plus de clichés cliniques, il est tout le temps à l'image, montré en gros plan avec quelques plans de coupe sur Desgraupes quand celui-ci le relance. Alors que le patient ne manifeste plus aucun signe d'atteinte syphilitique, les prises de sang dont il est l'objet, par exemple pendant une transfusion ou un bilan général, montrent que la maladie se poursuit. Ces examens peuvent pister une recrudescence, ainsi, les prises faites systématiquement par la CPAM en 1968 ont montré qu'1/50 des habitants de Paris examinés à cette occasion avaient une syphilis latente. "Ceci montre une augmentation très nette par rapport à il y a dix ans, et que l'on continue de passer à côté de beaucoup de syphilis primo-secondaires". Il existe cependant un pourcentage de personnes qui peuvent vivre avec une sérologie positive sans avoir "aucun accident". Des expériences scandinaves récentes, ("expériences un peu choquantes sur le plan humain, mais intéressantes sur le plan médical") ont consisté à surveiller pendant une longue période des syphilitiques non traités : 60% de ces personnes n'ont pas eu d'accident. "Mais il existe les 40% autres qui souffrent des caractéristiques de la syphilis tertiaire". Il s'agit de localisations d'accidents sur un organe spécifique avec des tendances destructrices. Atteintes au palais, au nez, au visage, aux organes internes du foie, avec lésions importantes. "Ce sont les manifestations les moins ennuyeuses." Les "grandes manifestations" prédominent sur deux types d'organes : d'une part, "syphilis cardio-vasculaire" localisation sur la partie "débutante de l'aorte", avec modifications profondes des tissus, entraînant une rétraction des valves avec possibles incidences cardiaques et une sclérose des orifices des artères coronaires. Ainsi 3% des angines de poitrine sont syphilitiques. L'autre région frappée est le système nerveux, avec comme manifestations le tabès qui donne des troubles de la marche et des "douleurs extraordinairement pénibles et difficiles à traiter", et la paralysie générale, accompagnée de manifestations psychiatriques - "une grosse détérioration de la personnalité, des manifestations délirantes." (23:16) | ||
ont montré qu'1/50 des habitants de Paris examinés à cette occasion avaient une syphilis latente. "Ceci montre une augmentation très nette par rapport à il y a dix ans, et que l'on continue de passer à côté de beaucoup de syphilis primo-secondaires". | |||
'''Intrication de l'exposé technique et du message préventif : la stratégie de discours''' | '''Intrication de l'exposé technique et du message préventif : la stratégie de discours''' | ||
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Le Pr Touraine évoque des traitements mis au point avant-guerre qui avaient permis "une très nette diminution de la syphilis tertiaire..." Il ajoute, en appuyant ses mots : "... à condition de faire ses traitements". Sans doute de cette façon prépare-t-il le spectateur au message qui va lui être adressé : s'il est atteint, il doit jouer le jeu de la prise en charge. | Le Pr Touraine évoque des traitements mis au point avant-guerre qui avaient permis "une très nette diminution de la syphilis tertiaire..." Il ajoute, en appuyant ses mots : "... à condition de faire ses traitements". Sans doute de cette façon prépare-t-il le spectateur au message qui va lui être adressé : s'il est atteint, il doit jouer le jeu de la prise en charge. | ||
De retour à l'image, Pierre Desgraupes prolonge les propos du professeur : "Et bien, on comprend par ce qui vient d'être dit l'intérêt de déceler au plus vite cette maladie". Ainsi, l'information fait prévention, l'énoncé des faits déclenche la prise de conscience. L'Émission médicale révèle ici son ambition : mobiliser les figures spécialisées du sujet qui livrent des exposés scientifiques de pointe, accompagnés par la parole médiatrice du sujet pour suggérer des précisions ou faire des synthèses, pour amener celui qui les reçoit à changer ou affiner la perception qu'il en avait. Or cette méthode s'applique même aux sujets "sociaux", c'est-à-dire, susceptibles de toucher de larges proportions de la population. Ici, le message préventif requiert une heure de temps, un vocabulaire de spécialiste plus ou moins explicité, des documents techniques comme des clichés et des graphiques professionnels pour atteindre la vigilance de son récepteur. Nous sommes dans une logique tout à fait différente de la stratégie de communication qui prévaut dans un spot. (23:40) | De retour à l'image, Pierre Desgraupes prolonge les propos du professeur : "Et bien, on comprend par ce qui vient d'être dit l'intérêt de déceler au plus vite cette maladie". Ainsi, l'information fait prévention, l'énoncé des faits déclenche la prise de conscience. L'''Émission médicale'' révèle ici son ambition : mobiliser les figures spécialisées du sujet qui livrent des exposés scientifiques de pointe, accompagnés par la parole médiatrice du sujet pour suggérer des précisions ou faire des synthèses, pour amener celui qui les reçoit à changer ou affiner la perception qu'il en avait. Or cette méthode s'applique même aux sujets "sociaux", c'est-à-dire, susceptibles de toucher de larges proportions de la population. Ici, le message préventif requiert une heure de temps, un vocabulaire de spécialiste plus ou moins explicité, des documents techniques comme des clichés et des graphiques professionnels pour atteindre la vigilance de son récepteur. Nous sommes dans une logique tout à fait différente de la stratégie de communication qui prévaut dans un spot. (23:40) | ||
'''Les modes d'examens et les conditions de leur analyse''' | '''Les modes d'examens et les conditions de leur analyse''' | ||
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Dernière version du 18 novembre 2024 à 12:04
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Titre :
Attention... aux maladies vénériennes
Série :
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Conseil scientifique :
Durée :
61 minutes
Format :
Parlant - Noir et blanc - 8 mm
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Archives détentrices :
Corpus :
Générique principal
Contenus
Sujet
Genre dominant
Résumé
Contexte
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Non.
- Images en plateau : Oui.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Oui.
- Animateur : Oui.
- Voix off : Non.
- Interview : Oui.
- Musique et bruitages : Oui.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
Communications et événements associés au film
Public
Audience
Descriptif libre
Notes complémentaires
Références et documents externes
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Joël Danet

