Narration documentaire ; succession de cas cliniques en situation de consultation, commentés par une voix off. Le sujet lui-même est présenté par un long préambule en voix off présentant historiquement le concept de l'hystérie (depuis les Grecs, Charcot et Freud).
Encart : « La projection de ce film est strictement réservée au corps médical » Générique sur les images d'un concert et sa musique (jeunes qui dansent, comme en transe), puis survient l'intervention de la police.
Préambule historique : l’œuvre de Charcot
En voix off :
« Il existe un langage du corps, un langage par le corps qui peut exprimer la vie affective la plus secrète par les décharges motrices les plus violentes. Ce mode archaïque d'expression prend des formes collectives ou individuelles qui, selon les cultures et les époques, sont considérées ou non comme pathologiques. Pour définir ces curieux phénomènes, les Grecs créèrent à l'époque hippocratique, le mot « hystérie », qui signifie « venant de l'utérus ». Ainsi, le rapport avec la génitalité est déjà présenti. Ce qui explique peut être, en partie, l'attitude de la société faite d’intolérances et d’agressivité. C'est à Paris, dans le cadre de la Salpêtrière, que Charcot, dans un esprit scientifique entièrement nouveau, place l'hystérie au centre des préoccupations médicales de son époque. En 1885, Freud arrive à la Salpêtrière. La personnalité de Charcot et de son enseignement le fascine d'emblée, au point qu'il abandonne ses études de neuroanatomie pour se consacrer à l'hystérie. Il écrit à sa fiancée « Charcot bouleverse mes idées et mes intentions, je sors de ses conférences comme de Notre-Dame. Mon cerveau est rassasié comme après une soirée au théâtre. Je ne sais si la semence fructifiera un jour ». En effet, dix ans plus tard, il sera amené à proposer des idées révolutionnaires pour déchiffrer le sens de l'hystérie. À la Salpêtrière, Freud avait vu se dérouler sous ses yeux le drame de la grande crise, dans toute sa théâtralité, à travers les différents stades que l'on décrivait et qu'un élève de Charcot a dessinés à l'époque. La phase des prodromes, la phase épileptoïde, les grands mouvements tels ceux en arc de cercle ou phase de clownisme, les attitudes passionnelles et les hallucinations, enfin la phase de résolution. Un siècle s'est écoulé, l'hystérie n'a pas disparu. »
Le début du préambule est lu sur les images du générique et du dit concert, puis sur des gravures de malades, des gros plans de la façade de l'hospice de la Salpêtrière, des portraits de Charcot, sur un zoom arrière qui dévoile le célèbre tableau de Brouillet : nous y voyons Charcot donner une leçon sur l'hystérie à la Salpêtrière, un portrait de Freud, un zoom arrière sur une plaque commémorative pour Freud, des photographies de Freud, une lettre à sa fiancée, son livre avec Breuer sur l'hystérie ; puis un retour sur le tableau de Brouillet et plusieurs croquis des phases de l'hystérie.
L'hystérie aujourd'hui : revue de cas
Le dernier croquis se transforme en une séquence de crises filmées en consultation pour mieux illustrer le passage à des cas plus contemporains. La caméra est centrée sur la femme en crise, et montre alternativement des gros plans sur visage, mais aussi des plans plus larges pour montrer les mouvements de son corps. Les commentaires sont faits sans ajout de sons (juste les petits cris et les gémissements de la femme) : « Le praticien a cependant rarement l'occasion d'observer le déroulement de la grande crise, telle que Charcot l'a décrite. Elle s'extériorise sous forme de décharges motrices, riches de significations symboliques. Comme Freud nous l'a appris, on tente de déchiffrer ici le sens de l'hystérie exprimant un conflit dont la nature sexuelle est évidente, avec l'assaut de la pulsion et du désir inconscient, la défense et les forces qui répriment et refoulent l'instinct. Toutes ses manifestations, émergeant des profondeurs du monde de l'inconscient, sont en effet l'expression du rêve, d'hallucinations, de fantasmes, liés au désir, à des réminiscences traumatiques. Nous comprenons que ces images, ce spectacle, aient constituées pour Freud la première semence d'où germèrent les idées de base de la psychanalyse ».
Nouvelle séquence, nouvelle patiente : « Chez cette autre malade, le conflit s'exprime sous forme d'une crise moins spectaculaire dont le sens n'est pas moins clair. Il s'agit de l'expression corporelle d'une idée intolérable, c'est-à-dire d'une conversion somatique. Cette malade est âgée de 23 ans, ses crises ont débuté à l'âge de 18 ans, coïncidant avec un travail qui lui déplaisait et avec diverses sollicitations sexuelles qu'elle a repoussées. Ses crises, depuis un an, l'empêchent de travailler. La triple fonction du symptôme apparaît déjà : expression d'un conflit inconscient, fuite dans la maladie, désinsertion sociale. »
Nouvelle patiente, plus âgée : « Voici une autre forme d'expression symbolique d'une représentation refoulée. La position allongée sur le divan du praticien suffit à provoquer chez cette malade des décharges motrices. Ces mouvements, cette hyperactivité corporelle n'ont pas d'origine lésionnelle ; il s'agit d'un langage du corps chez des malades qui ne parviennent pas à exprimer leur conflit avec des mots. Il s'agit véritablement d'un langage, nécessitant la présence d'un interlocuteur. La signification reste hermétique pour le sujet. L'apaisement, on pourrait même dire la satisfaction qui termine la crise, reste également méconnu de la malade. » Cette même malade est ensuite filmée en consultation au bureau d'un médecin ; elle explique son incompréhension, car pour elle, rien n'explique ses symptômes.
Une nouvelle patiente, adolescente est en entretien : le commentaire explique que « ses troubles ont commencé par une aphonie ». Elle explique le commencement, son aphonie, ses rendez-vous chez différents spécialistes, ses multiples consultations, les crises d'épilepsie de son amie. Le commentaire poursuit, liant ses troubles à la crise d’adolescence. Un cas d'astasie-abasie (troubles de la marche, avec perte de l'équilibre) est présenté, témoignant « d'une régression infantile profonde » et illustré par une patiente qui tombe d'abord dehors, puis allongée sur un lit d'hôpital, en crise de pleurs. Cette même femme est retrouvée plus tard, rétablie, « mais pas à l'abri d'une rechute » donc devra suivre une psychothérapie préventive. Le commentaire poursuit : « il semblerait en effet que les manifestations motrices, jadis spectaculaires, cèdent peu à peu la place dans le contexte culturel de la société moderne, à des expressions d'ordre sensitif, plus difficile à interpréter ». Une nouvelle patiente en consultation explique ses troubles, pourtant le commentaire indique qu'aucun n'est organique.
Le film se construit comme une succession de consultation chez le médecin avec quelques commentaires explicatifs (causes des troubles, symptômes, suivi médical). La caméra fait alterner les gros plans (plan-émotion qui montre une douleur réelle chez le patient) et les plans plus larges pour montrer que la caméra est à côté du médecin (on le voit à peine) et que les scènes présentent des patients authentiques.
Successivement, le film présente : une crise de convulsion type Charcot, une aphonie, une astasie-abasie, une dysphonie, une paralysie, une fugue amnésique (avec séance d'hypnose), une cystalgie à urine claire, pour terminer avec un polyopéré. Ce malade est présenté comme ayant réalisé un « véritable tour de France médico-chirurgical » : il est entré dans une complaisance médicale (une centaine de médecins consultés et une vingtaine d'opérations) et « refuse d'être considéré comme un malade psychique » et souhaite une reconnaissance organique de ses troubles. Ce cas est introduit afin d'aider le médecin à considérer l'aspect psychiatrique.
Conclusion : nécessité de former le médecin pour l'aider à affiner son jugement
Le commentaire final est prononcé sur une succession de courtes images des consultations précédentes :« Devant cette variété de manifestations multiples, labiles, étranges, dont le caractère outrancier et ostentatoire le frappe, le praticien a tendance à nier le trouble qu'il ne ressent pas comme vrai. Il est enclin même à considérer le malade comme simulateur ou pervers. Il lui est cependant difficile d'éluder la réalité clinique et de nier le fait que derrière ce symptôme, se dissimule un drame venant des profondeurs. La difficulté du traitement vient non seulement du malade, parfois fuyant, insaisissable, qui tente d'échapper sans cesse au dialogue psychothérapique, mais aussi de l'attitude du médecin, de ses réactions, de la peine qu'il a à surmonter son irritation. Pourtant, le dialogue médecin-malade, fait de patience et de disponibilité demeure l'instrument le plus efficace pour traiter ces malades. C'est en fait la formation psychologique du médecin, sa collaboration avec le psychiatre qui le rendra sensible aux possibilités diagnostiques et thérapeutiques de cette relation. À l'hôpital, il faudrait une meilleure insertion du psychiatre dans l'équipe médicale. Pour encore mieux comprendre la pathologie conversationnelle, ce saut mystérieux du psychique au somatique, dont parlait Freud, il faudrait encore d'innombrables recherches. L'hystérie, la plus énigmatique des maladies nerveuses, n'a pas révélé tous ses secrets. »
FIN
Fonds Eric Duvivier code 255.