L'accueil des enfants
Vue générale d'un immeuble moderne, gros plan sur une plaque qui indique que ce bâtiment est une crèche municipale à Paris. Succession de cinq scènes identiques montrant une personne adulte accompagnée d'un ou deux enfants. Elle ouvre une petite porte grillagée qui donne accès au couloir extérieur, puis ouvre une porte vitrée dont la décoration de dessins vivement colorés exprime la vocation du lieu. Nous devinons que les adultes montrés sont des parents qui confient leurs enfants à la crèche. Un seul d'entre eux est un homme, aucun adulte ne se présente avec un autre adulte, les regards caméras des enfants montrent qu'ils sont conscients d'être filmés : la caméra ne se cache pas. Vue intérieure, une femme en blouse avec des enfants, dézoom, une autre femme apparait dans le champ. Cette dernière fait un geste d'au-revoir, nous devinons que c'est une mère qui s'entretient avec une responsable de la crèche avant de partir. La pièce est conçue pour le séjour des enfants : canapé à leur taille rangé le mur, dessins colorés d'arbres et d'animaux, profusion de tapis et coussins, petit toboggan. Répétition de la scène avec d'autres parents qui s'attardent dans cette pièce, le temps de procéder aux au revoir avec les enfants qu'ils ont amenés. C'est un rituel où chaque enfant vit un transfert de tutelle et de référent affectif. La séquence est complétée par des vues d'enfants se livrant à des jeux collectifs, bataille de coussins, tours de balançoires... Nous voyons que le local est particulièrement fourni en équipements ludiques qui développent l'éveil corporel. (03:58)
Scènes de bac à sable
Une feuille scotchée sur une paroi vitrée, couverte d'une écriture manuscrite. Elle indique : "crèche Cabanis, octobre 1983,chez les 'grands' et 'moyens grands' 15 mois-3 ans". Vues en plongée sur une cour équipée d'un toboggan et d'un bac à sable où les enfants évoluent, accompagnées de plusieurs puéricultrices. L'espace est étroit, les enfants sont nombreux, néanmoins les activités se déroulent sereinement. La caméra isole l'un ou l'autre des enfants dans le champ. L'un d'eux se coiffe d'un seau renversé, un autre s'attarde sur le sommet du toboggan et se positionne pour le descendre à l'envers. Les deux puéricultrices qui sont assises côte à côte sur un banc ont toutes les deux, sur leurs genoux, un enfant qui n'a pas quitté son doudou. (08:39)
Les vivres vinrent à manquer...
Une serviette éponge pend sur un dossier de chaise, verte, semée de motifs d'éléphants blancs. C'est la serviette que tous les enfants mettent au cou pour manger. Installés à des tables basses en L par cinq ou six, ils sont surveillés par trois puéricultrices. Certaines rejoignent les tables et encouragent les enfants à s'alimenter en portant elles-mêmes un peu de nourriture à leur bouche puis en faisant un "miam" encourageant. Comme pour la scène tournée dans la cour, la caméra resserre sur l'un ou l'autre des enfants, selon qu'il emploie la cuillère ou ses doigts pour porter la purée colorée ou un bloc de viande à sa bouche. Assez curieusement, la musique choisie pour animer le déjeuner dans le réfectoire est la chanson Il était un petit navire. Nous entendons une femme chanter : "Au bout de cinq à six semaines les vivres vinrent à manquer" sur le plan d'une petite fille qui tient sa cuillère en suspens au-dessus de son assiette. Le panoramique dans la pièce saisit un projecteur installé pour l'éclairage du film. Les assiettes sont disposées sur les serviettes nouées au cou des enfants, certains réussissent néanmoins à consteller abondamment la surface de leur table de projections de purée. Un plan montre des jeux de jambes sous la table où deux enfants mangent côte à côte. Un autre enfant pose son pied sur la table. Voix lasse d'une puéricultrice : "C'est marrant les pieds dans les carottes!" La séquence se termine sur les réticences d'un enfant à engloutir son riz, finalement vaincues par la puéricultrice qui lui répète que "ce n'est pas chaud", ou bien est-ce parce qu'elle finit par lui tourner le dos qu'il s'intéresse à son assiette. (13:11)
"Donne -lui à boire"
Volet pratiqué par une main placé devant l'objectif et s'en écartant de manière progressive. Autre scène de repas, l'ambiance parait plus calme, les enfants sont plus grands. Dans un coin de la pièce, une maison en carton avec l'enseigne "épicerie" accrochée à son pignon. Sur des pupitres d'écolier rangés contre les murs sont disposés des parkings miniatures. "Donne-lui à boire!", dit une puéricultrice à un enfant attablé avec son alpin en peluche, plaçant devant lui un verre rempli d'eau. Docile il s'exécute, tend le verre au lapin dans des rires qui résonnent hors champ. Du raisin au dessert, noir et vert, les enfants sont filmés en gros plan entrain d'arracher les grains à la grappe et de les porter à leur bouche. Ils sont rassemblés autour de tables semi circulaires. (15:01)
Au pot, à la toilette
Un plan de coupe sur des feuillages peints sur la fenêtre entre deux scènes de repas. Nous retrouvons le même décor dans le plan suivant, ainsi que l'épicerie en carton. la pièce est à présent occupée par des lits. Nous comprenons que la même pièce sert de réfectoire et de dortoir. En plan moyen et ralenti, une petite fille ôte ses chaussures et ses chaussettes ; au plan suivant elle déplie la structure amovible de son lit. Le film insiste ainsi sur la limite d'espace dont pâtit la crèche, mais aussi sur l'apprentissage par les enfants de la débrouillardise et de l'autonomie que cette contrainte entraîne. Un petit garçon baisse son slip et, concentré et résolu, fait quelques pas avec son slip entravant ses chevilles. Scènes de change, les puéricultrices, autant qu'elles lavent les fesses sales, manipulent les enfants pour leur faire sentir l'élasticité de leurs corps. Autre scène d'autonomie, un garçon saisit un des pots rangés sur une étagère, le porte pendant quelques pas, le pose au sol, s'installe dessus. La caméra suit très attentivement l'agencement de ses gestes alors qu'il regarde hors champ d'un air interrogatif : attend-il une approbation? A l'un des lavabos communs, un fille, la main prise dans un gant de toilette, se frotte le bas du visage avec méthode. Dans le champ cohabitent deux enfants, l'un d'eux se brosse les dents d'un geste habile, l'autre qui machouille vaguement sa brosse regarde son voisin avec attention, comme s'il était soumis à un modèle. (17:45)
Dodos
"Dodo... dodo..." répète un enfant qu'une puéricultrice emmène au lit. Alors qu'il est couché, elle reste à son chevet, dispose contre lui doudou et biberon. Au bord cadre supérieur, un micro bonneté est tendu vers eux pour capter leurs échanges. "Suffit maintenant, on se couche!" Le plan s'élargit sur l'alignement des lits. Les puéricultrice encouragent des enfants plus ou moins réticents à céder au sommeil. Jeu avec les draps, on se lève ou on s'étend avec une obéissance ostensible. Succession de plans montrant des puéricultrices berçant les enfants d'une main posée sur leur hanche ou leur épaule. Zooms sur des enfants endormis, le pouce dans la bouche, certains coiffés de leur doudou. Silence dans la pièce, puis diffusion d'une musique orientale après qu'une des puéricultrices est allé abaisser un volet incliné. (22:40)
Réveils
Scènes de réveil, les enfants restent calmes et couchés, les yeux grand ouverts. D'autres dorment encore. La caméra insiste sur les enfants en couche qui se sont installés sur le ventre et à genoux. Les puéricultrices préparent les activités : lecture et découpages. L'une d'elles dispose des feuilles en papier au bout des ramures d'un arbre dessiné au mur. Musique jouée à la flûte. Noir, une feuille de papier sur laquelle est écrit : "Réveil de la sieste". Une des puéricultrices, revenu à la fenêtre, a levé le volet roulant. Dézooms sur des enfants à présent réveillés, très sages. L'un d'eux applaudit la musique qui continue de jouer, bientôt imité par deux de ses voisines. Elles sourient, contentes de ce jeu commun. Avec celle du brossage de dents et des jeux de jambes, c'est une des rares scène d'interaction entre enfants.