Introduction : arrivée en ambulance, soins d'urgence
Dans les rues de Paris, une ambulance se fraye un chemin parmi le trafic. GP gyrophare. Pas de musique. Travelling depuis la place du mort. Les mots “éveil” et “l'hôpital aujourd'hui...” apparaissent sur les prises de vues de la séquence : l'urgence de la situation (un blessé à soigner) ne permet pas au film de faire une pause pour le générique. On entre par la porte classique de l'hôpital Saint Antoine, on aboutit à l'un de ses bâtiments récents. Le commentaire commence : “Aujourd'hui, un jour ou l'autre, tout le monde peut se retrouver à l'hôpital. Cela peut commencer ainsi...” La voix est posée, le registre des phrases est soutenu, le style littéraire, imprimant une distance avec le sujet, invitant à analyser le propos en même temps qu'on le découvre, rappelle celui des documentaires de Resnais, Varda ou Franju. Des infirmiers roulent un brancard sur lequel une femme est allongée. Elle a été renversée par une voiture, elle est menée au service des Urgences nous explique la voix. “Premier contact : la salle de déchocage. Immédiatement, une machinerie énorme se met en marche”. Par un travelling serré sur le champ opératoire (les parties du corps de la femme blessée sur lesquelles on intervient, les bras des infirmiers à l'œuvre, les équipements mobilisés) détail des premiers soins : injection de sérum, respiration artificielle, analyse de sang, tension, radio. L'anonymat du patient est préservé, son visage est peu visible, sinon sa joue salie de sang. Le spectateur a l'impression d'assister à une situation réelle.
Dans l'agitation des soins, interview d'une infirmière
De même dans la séquence suivante qui nous emmène dans le hall d'accueil puis dans le couloir de gériatrie. Un médecin et une infirmière surgissent, l'infirmière ouvre la porte d'un bureau, la médecin soupire dans un coin du cadre. Toujours pas de musique, à la place, une ambiance sonore confuse. Une voix hors champ arrête l'infirmière dans son élan pour un entretien qui paraît ainsi impromptu. “Quelle est la nature du travail d'une infirmière dans un service d'Urgences?” Au moment où l'infirmière répond “C'est d'accueillir les malades pour des premiers soins et de les diriger par la suite”, deux infirmiers font irruption dans le champ en transportant une femme allongée sur une civière, laquelle vient s'inscrire parfaitement dans la diagonale du cadre : comme au moment du générique, le film se cale sur le rythme de l'activité médicale ; ici, il s'adapte aux perturbations qu'elle provoque dans le tournage.
Le service de réanimation
Accès au service des grands malades installé au premier étage. Le Pr Amstutz rappelle la vocation du service de réanimation en se tenant au chevet d’un homme enfoui sous une couverture, plongé dans le coma depuis qu’il est « tombé d’un échafaudage. » Il explique le fonctionnement d’un respirateur artificiel, puis, dans une autre chambre, celui d’un rein artificiel, machine dont on voit les cadrans et les nombreux tuyaux auxquels elle est reliée. Il ajoute : « Ce service dispose de moyens extrêmement perfectionnés pour le traitement des maladies graves. Bien entendu, il est très coûteux et dispose d’un personnel nombreux et qualifié. »Une femme âgée est examinée par un médecin pour sa hanche. Il analyse des planches radio, dicte à une secrétaire la prescription d’une intervention chirurgicale. Le commentaire, relayé par l’image, insiste sur la stricte observation des mesures de stérilisation, plans sur des instruments passant à l’autoclave. « Nous sommes loin du manque d’hygiène du XIXe siècle. » Les chirurgiens passent des vêtements « aseptisés », on les voit se laver les mains. Séq. d’anesthésie, « immense progrès de la chirurgie. » La réalisation s’appuie sur des points de vue variés, avec des plans assez brefs pour saisir l’activité multiple, depuis les visages des chirurgiens jusqu’au va-et-vient des infirmières.
Les soins et les jours
2e partie : « le malade à l’hôpital. » Trois infirmières arpentent un couloir. Dans une chambre, elles viennent ouvrir les volets et changer les draps. « 7 h du matin, la journée commence. » D’après le commentaire, nous sommes dans le service de chirurgie osseuse de l’hôpital Saint Antoine. Une infirmière manœuvre un plateau entre des lits. Premiers soins, puis « à neuf heures, le petit déjeuner. » Deux femmes âgées discutent échangent depuis leurs lits sur leur alimentation et leurs promenades. Plan rapproché sur une aide-soignante qui commente son métier : « Beaucoup de nursing, c’est nous qui sommes les plus proches du malade, on discute beaucoup. »
Visite du patron
(22.00) Un groupe de médecins en blouse blanche se rend d’une chambre à l’autre. « Un grand événement pour le malade : la visite du patron. » Après un examen rapide du patient, il donne son analyse à un auditoire attentif. Sa parole est rare, sur un ton d’évidence. « C’est quelqu’un qui comprend d’un coup d’œil, témoigne une patiente âgée, le visage en GP. Vous ne trichez pas avec lui, ajoute-t-elle, une lueur admirative dans le regard. » Une autre patiente, la quarantaine, tempère, affirmant qu’elle s’ouvre davantage à l’interne qui la visite quotidiennement, « on est moins impressionné. » Dans une salle de cours, le patron donne ses recommandations aux médecins qui lui exposent les cas dont ils ont la charge. (27.30) Une infirmière explique son métier, elle aussi parle de « nursing ». « L’après-midi est beaucoup plus calme, c’est un moment réservé aux visites de famille. » Dans une chambre, un patient échange avec des personnes qui se tiennent à son chevet, un autre écoute la radio, deux autres regardent la télévision. Il s’agit d’une chambre à quatre lits, « d’autres sont à deux lits. »
Rappel historique sur la structure hospitalière
(32.50) Travelling dans un couloir spacieux puis pano sur une façade moderne qui jouxte une façade classique. Le commentaire précise que la modernisation de l’hôpital Saint-Antoine a coûté très cher. Un autre hôpital en « cours de rénovation » : l’hôpital Tenon où il existe encore des salles communes « selon la conception du Moyen Âge ». Elles sont appelées à disparaître avant 1980. Plans rêveurs sur un plafond gris, des charentaises élimées au pied d’un lit. « L’hôpital, cependant, est de plus en plus équipé. Est-ce suffisant ? »
Le rapport au patient aujourd'hui : nouveaux enjeux, nouveaux débats
Entretien sur l’évolution du rapport au patient avec des médecins spécialisés dans la maladie du poumon. Le Pr Decroix : « La technicité est une nécessité de nos jours, mais rien ne remplace la qualité, le dévouement du personnel soignant. ». Le Dr Kompalitch enchaîne : « Le risque est de découper le malade en tranches pour ne voir chez lui que le cœur, l’estomac, ou le poumon, et d’oublier que c’est quelqu’un qui dit : ‘je souffre’ et pour lequel on doit avoir beaucoup d’attention. » En plan de coupe, on le voit au chevet d’un patient, s’enquérant de son état et de ses projets de convalescence. Retour à l’entretien. Le docteur commente l’excès d’occupation des hôpitaux : « Les médecins ont de plus en plus peur que le problème leur échappe et se rassurent derrière une grande structure. » Conforté par les hochements de tête approbateurs du professeur, il ajoute que l’hôpital devrait davantage se développer vers l’extérieur pour comprendre « dans quelles conditions se développe la maladie. » Il cite la tuberculose « qui ne tombe pas par hasard : c’est le résultat de conditions sociales, d’hygiène, d’alimentation. Ce n’est pas par hasard si ça touche les travailleurs immigrés qui vivent dans des conditions déplorables. » Il évoque aussi la chaîne et le système des trois-huit « qui finissent par rendre les gens malades, anxieux, angoissés. Ils se tournent alors vers le médecin. C’est le déclenchement de l’hospitalisation. »Dernier travelling dans le couloir, un médecin qui s'apprêtait à sortir d'une chambre cède le passage avec un air agacé. Le film ne cache rien de l'accueil difficile, voire problématique, qui a été réservé à son tournage. Dernier commentaire : « espérons que notre société saura réduire le nombre et rendre meilleure la vie du malade. » Dans le même élan, la voix off lit le générique.