Contexte historique :
L'Islande est sous la domination du Danemark de 1536 à 1918. Entre 1918 et 1944, c'est un pays indépendant en "union personnelle" avec le roi du Danemark (les Danois conservent la gestion des affaires internationales de l'Islande, notamment la protection des eaux territoriales.) La République d'Islande est fondée le 17 juin 1944.
Contexte cinématographique :
Le film islandais le plus ancien à avoir été conservé est un documentaire de 3 minutes tournée par le Danois Alfred Lind.
Le cinéma islandais prend forme sous l'impulsion des productions danoise, en commençant par l'arrivée de la compagnie Nordisk Film de Copenhague en 1919 pour un long-métrage intitulé L'Histoire de la famille Borg.
Pendant toute la période de tutelle danoise, les réalisateurs insulaires restent dans l'ombre des cinéastes danois et étrangers, bien mieux équipés techniquement et financièrement.
Contexte médico-sanitaire :
Le médecin qui a traduit les intertitres d'allemand en islandais, le professeur Gunnlaugur Claessen, est le pionnier de la radiologie en Islande.
Gunnlaugur Claessen nait le 3 décembre 1881 dans le nord de l'Islande. Il s'inscrit comme étudiant à Reykjavík en 1901 et étudie la médecine à l'université de Copenhague jusqu'en 1910. Il suit une formation en radiologie à Copenhague et à Stockholm. Il passe son doctorat en médecine au Karolinska Institutet de Stockholm en 1928. Il fait de nombreux voyages d'étude en Angleterre, Allemagne, France et Suède pour approfondir sa formation en radiologie et se tenir au courant des évolutions de cette discipline.
À partir de 1913, il travaille comme médecin généraliste à Reykjavík. En janvier 1914, il est nommé directeur du nouvel institut Roentgen universitaire de Reykjavík qu'il a contribué à fonder. L'institut occupe les trois pièces d'une petite maison au centre de Reykjavík qui compte alors 13 800 habitants. À cette époque, l'approvisionnement en électricité n'est pas très stable en Islande. L'électricité nécessaire à l'institut est générée dans l'atelier d'un charpentier tout proche. Le Professeur Claessen est parfois obligé de téléphoner aux charpentiers pour leur demander d'éteindre leurs machines, le temps qu'il termine un examen qui demande exceptionnellement plus de puissance !
En 1930, il est nommé chef du service de radiologie de l'hôpital universitaire de Reykjavik qui vient d'ouvrir. Il commence également à donner des cours de radiologie à l'université d'Islande.
Claessen publie des articles sur des sujets en lien avec la radiologie dans des publications spécialisés islandaises et internationales, notamment sur le radiodiagnostic et les différents types de radiothérapie.
Il recommande l'utilisation de la radiographie pour le diagnostic de la tuberculose pulmonaire et indique que les examens radiologiques de masse marquent l'ouverture d'une nouvelle ère dans le domaine de l'hygiène sociale dans la lutte contre la tuberculose. Il participe d'ailleurs activement à l’organisation des campagnes islandaises contre la tuberculose et le cancer.
L'ouvrage qui contribue le plus à la renommée international de Claussen est Diagnostic Radiology for Practitioners and Students publié en danois en 1940 et réédité en 1946. L'ouvrage est abondamment illustré et témoigne des excellentes qualités techniques du département de radiologie de l'hôpital universitaire de Reykjavík. Il réussit à terminer la traduction en anglais de son ouvrage en y ajoutant des compléments et mises à jour peu de temps avant sa mort.
Dans la période 1915-1935, il fait le diagnostic, traite et assure le suivi de 152 cas de favus (teigne du cuir chevelu), ce qui aboutit à la quasi-éradication de cette pathologie dans le pays.
Il fonde et préside la Croix-rouge islandaise pendant de nombreuses années. Il préside l'association des médecins islandais et il est le rédacteur de la revue de l'association de 1923 à 1930. Entre 1920 et 1926, il fait également partie du conseil municipal de Reykjavík. À ce poste, il fait passer un arrêté interdisant d'avoir un chien en ville, ce qui, outre son action thérapeutique dans ce domaine, permet de débarrasser le pays de l'hydatidose (parasitose le plus souvent hépatique ou pulmonaire provoquée par les formes larvaires d'Echinococcus granulosus), car les chien sont les hôtes des formes adultes de ce parasite.
Entre 1914 et 1920 puis de nouveau entre 1923 et 1926, Claessen donne des cours de physiologie à l'université de Reykjavik.
Il s’intéresse beaucoup à l'introduction de la crémation en Islande. En 1934, il fonde la société islandaise de crémation qu'il préside jusqu'à sa mort.
Il publie également des articles sur l'alimentation, la recherche sur les vitamines, l'allaitement, la santé dentaire, la vie et l’œuvre de Joseph Lister, etc., à la fois dans des revues spécialisées et dans des magazines et des journaux grand public.
Parlant couramment le danois, le suédois, l'anglais, l'allemand et le français, il traduit quelques ouvrages médicaux en islandais à partir de 1941, lorsque de graves crises d'asthme l'empêchent de travailler pendant de longues périodes. Il avait déjà traduit les sous-titres du film allemand Falsche Scham au milieu des années 1920.
Gunnlaugur Claessen meurt le 23 juillet 1948 des suites d'une pneumonie aiguë.
Concernant le film Falsche Scham:
Falsche Scham est l'un des premiers films de prévention des maladies vénériennes à présenter une structure fictionnelle dramatique dans laquelle sont insérées des séquences d'information scientifique et médicale (Auparavant, il y avait eu tout de même The_end_of_the_road en 1918 aux États-Unis.). À ce titre, il marque un tournant dans l'histoire de ce genre cinématographique. Dans les années qui suivent, d'autres films reprennent cette structure. Exemples : Il était une fois trois amis (1929) et Feind im Blut (1931).
C'est aussi le premier film de ce type à avoir un tel succès international.
Le film allemand est accompagné d'un livre de plus de 200 pages écrit par Curt_Thomalla et présenté comme le manuscrit du film. Dans la préface écrite par le Prof. Adam, secrétaire général de l’Office d’Instruction hygiénique populaire du Reich, la nécessité de la publication de cet ouvrage est expliquée de la façon suivante :
« Je n’ai qu’une crainte concernant ce film, comme tous les autres : c’est que les impressions qu’il suscite n’aient pas un effet durable. Je vous suggère donc la chose suivante. À partir des nombreuses et excellentes images de ce film, on doit pouvoir produire un atlas particulièrement frappant et exhaustif des maladies vénériennes. C’est précisément la forme si accessible et populaire des images cinématographiques qui donnerait toute sa valeur à un livre de ce genre sur les maladies vénériennes. » („Nur eine Befürchtung habe ich bei diesem wie bei jedem Film: daß nämlich die Eindrücke nicht nachhaltig und lange genug wirken. Ich gebe ihnen folgender Anregung. Aus den zahlreichen vorzüglichen Bildern läßt sich doch zweifellos ein ungeheuer eindrucksvoller und das ganze Gebiet erschöpfender Bilderatlas über das Thema der Geschlechtskrankheiten herstellen. Gerade die so ungemein leichtfassliche und populäre Gestaltung der Filmbilder wäre auch für ein solches Volksbuch über die Geschlechtskrankheiten von gewaltigem Wert.ˮ)
Ce livre est beaucoup plus détaillé que le film. Il apporte de nombreux éléments de contexte sur les personnages, insiste beaucoup sur leurs émotions et parle également des scientifiques qui ont découvert les agents infectieux de la gonorrhée et de la syphilis ainsi que du traitement.
Dans la première partie, le médecin le plus expérimenté fait à son jeune collègue sur le point de démarrer sa conférence un plaidoyer pour ce mode d'information que l'on peut peut-être prendre également pour un plaidoyer déguisé pour le medium filmique :
"C'est une bonne chose que de faire une visite, cher confrère, mais il me semble que la plupart des gens ne sont entrés ici que parce qu'ils sont attirés par le sensationnel. Votre conférence va devoir secouer chacune des personnes ici présentes pour les tirer de leur indifférence. Regardez-les se comporter comme s'il n'y avait rien de plus ordinaire que ce que nous montrons ici. Aucun d'entre eux ne se doute que l'image des terribles souffrances qu'il a sous les yeux renvoie à une tragédie humaine qu'aucun roman de mœurs, ni aucun roman policier ne pourrait présenter de façon plus bouleversante." („Der Besuch ist gut, Herr Kollege, aber es scheint mir, dass die meisten Leute nur hereingekommen sind, weil sie hier eine besondere Sensation wittern. Ihre Sache wird es sein, mit ihrem Vortrag jeden einzigen aus seiner Gleichgültigkeit auszurütteln. Sehen Sie nur, wie sie alle tun, als wären es die alltäglichsten Dinge von der Welt, die wir ihnen hier zeigen. Nicht einer ahnt, daß das Abbild der furchtbaren Leiden, die er vor sich sieht, gleichzeitig die Geschichte einer menschlichen Tragödie ist, wie sie kein Sitten- oder Kriminalroman erschütternder Darstellen könnte !ˮ)