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« Ballet sur un thème paraphrénique » : différence entre les versions
De MedFilm PPRD
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|Lieu projection={{HTProj | |Lieu projection={{HTProj | ||
|Langue=fr | |Langue=fr | ||
|Texte= | |Texte=Séances promotionnelles organisés par l’industrie pharmaceutique à destination du corps médical ; séances sponsorisées par les laboratoires, mais organisés par Duvivier lui-même ; circuits indépendants traditionnellement réservés au cinéma expérimental ou d’art et essai (Bonah 2023, 689-690). | ||
Les conditions exactes de diffusion du Ballet sur un thème paraphrénique restent malheureusement en grande partie incertaines. Une mention dans le journal espagnol Arbor en 1964 indique que le film semble avoir été projeté à l’Aula de Cine de la Escuela Oficial de Cinematografia (Cours de cinéma de l'École officielle de cinématographie) en compagnie d’un autre film de Duvivier, Le monde du schizophrène. | Les conditions exactes de diffusion du ''Ballet sur un thème paraphrénique'' restent malheureusement en grande partie incertaines. Une mention dans le journal espagnol Arbor en 1964 indique que le film semble avoir été projeté à l’Aula de Cine de la Escuela Oficial de Cinematografia (Cours de cinéma de l'École officielle de cinématographie) en compagnie d’un autre film de Duvivier, ''Le monde du schizophrène.'' Il est aussi fait mention du film dans les revues ''Journal of Psychosocial Nursing and Mental Health Services'' (jan. 1965) ainsi que dans le journal ''Mental Hospitals''(juil. 1965), deux publications états-uniennes. | ||
Le film a été récemment diffusé en 2021 au Ji.hlava film festival dans le cadre d’une programmation intitulée Pharm'n'Films: Psychedelic Sandoz qui regroupe deux films de Duvivier — ''Ballet sur un thème paraphrénique'' et ''Images du monde visionnaire'' — ainsi que ''The Burning Ear'' (1970) du réalisateur états-unien Edd Dundas. | |||
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|Communications et événements associés au film={{HTCom | |Communications et événements associés au film={{HTCom | ||
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|Langue=fr | |Langue=fr | ||
|Texte='''Introduction''' | |Texte='''Introduction''' | ||
Le film est structuré par un va-et-vient entre : un récit-cadre prenant place dans un unique espace ressemblant à une chambre d’hôpital dans laquelle une jeune femme (la patiente) narre un rêve, une vision ou un souvenir à un homme (le médecin) ; une série de récits enchassés ou « tableaux » qui matérialisent ou traduisent visuellement et acoustiquement le contenu de cette narration. Tantôt la patiente est en interaction avec le médecin, tantôt elle livre une narration quasi somatique de ses expériences. | |||
Récit-cadre | ''Récit-cadre'' | ||
La jeune femme, les yeux vers le plafond dans une position pensive, commence à narrer une séquence d’événements: | Le film s’ouvre sur une séquence présentant une femme habillée d’une blouse blanche de patiente et alitée dans une chambre sombre au carrelage noir et blanc qui évoque un damier d’échec et comprenant une seule fenêtre barrée. À son chevet, un homme, de dos et habillé d’une blouse blanche, est assis sur une chaise prenant des notes. La jeune femme, les yeux vers le plafond dans une position pensive, commence à narrer une séquence d’événements: | ||
« Je me souviens très bien du jour où cela m’arriva. Je dansais. Je dansais… C’est alors qu’un sentiment bizarre se fit jour en moi. Je dansais devant des portes vides qui s’ouvraient sur nulle part. Des portes béantes, des trous qui devenaient sphères, cubes, ballons. Des portes qu’on ne pouvait pas ouvrir parce qu’elles se fragmentaient dès qu’on voulait les traverser. » | « Je me souviens très bien du jour où cela m’arriva. Je dansais. Je dansais… C’est alors qu’un sentiment bizarre se fit jour en moi. Je dansais devant des portes vides qui s’ouvraient sur nulle part. Des portes béantes, des trous qui devenaient sphères, cubes, ballons. Des portes qu’on ne pouvait pas ouvrir parce qu’elles se fragmentaient dès qu’on voulait les traverser. » | ||
Zoom sur la patiente et mise en hors-champ progressive du médecin. Elle continue, de plus en plus animée : | Zoom sur la patiente et mise en hors-champ progressive du médecin. Elle continue, de plus en plus animée : | ||
« Et je dansais toujours, cherchant quelque chose ou quelqu’un auquel je pourrais m’accrocher. Et c’est alors que je rencontrais la toile à laquelle je m’agrippais pour ne pas tomber dans la cage qui tournait… tournait… tournait. » | « Et je dansais toujours, cherchant quelque chose ou quelqu’un auquel je pourrais m’accrocher. Et c’est alors que je rencontrais la toile à laquelle je m’agrippais pour ne pas tomber dans la cage qui tournait… tournait… tournait. » | ||
Sur les derniers mots, le film opère une coupe et un recadrage dans l’axe sur la jeune femme qui se lève et s’approche de la caméra, créant un volet qui amorce le passage vers la première mise en images du récit de la patiente. | Sur les derniers mots, le film opère une coupe et un recadrage dans l’axe sur la jeune femme qui se lève et s’approche de la caméra, créant un volet qui amorce le passage vers la première mise en images du récit de la patiente. (02:36) | ||
''tableau'' | |||
Plus directement stylisé et évoquant les tableaux surréalistes de Giorgio de Chirico, le nouvel espace est délimité par une série de murs entrecoupés de plusieurs arches donnant sur une trame de fond peinte, elle-même composée d’arcades. S’éloignant de la caméra dans un léger pas de danse, la jeune fille, vêtue de la même robe/blouse maintenant verte, semble évoluer avec curiosité au sein de ce nouvel espace. En fond sonore, une composition bruitiste mélange des sons de cloches, d’horloges et d’alarmes, bientôt accompagnés d’une marche militaire jouée au tambour. La patiente pénètre dans une des arches. Lorsqu’elle en ressort, la musique change pour adopter une tonalité plus traditionnellement symphonique. Comme apeurée, la jeune femme se met à danser de manière plus agitée avant de pénétrer dans une des arches et se retrouver dans un troisième espace entièrement noir où flottent une série de formes, rappelant directement les « sphères, cubes, ballons » qu’elle évoquait précédemment. | Plus directement stylisé et évoquant les tableaux surréalistes de Giorgio de Chirico, le nouvel espace est délimité par une série de murs entrecoupés de plusieurs arches donnant sur une trame de fond peinte, elle-même composée d’arcades. S’éloignant de la caméra dans un léger pas de danse, la jeune fille, vêtue de la même robe/blouse maintenant verte, semble évoluer avec curiosité au sein de ce nouvel espace. En fond sonore, une composition bruitiste mélange des sons de cloches, d’horloges et d’alarmes, bientôt accompagnés d’une marche militaire jouée au tambour. La patiente pénètre dans une des arches. Lorsqu’elle en ressort, la musique change pour adopter une tonalité plus traditionnellement symphonique. Comme apeurée, la jeune femme se met à danser de manière plus agitée avant de pénétrer dans une des arches et se retrouver dans un troisième espace entièrement noir où flottent une série de formes, rappelant directement les « sphères, cubes, ballons » qu’elle évoquait précédemment. | ||
Après une courte danse au milieu de ces formes flottantes, une troisième coupe positionne la caméra en plongée sur la jeune femme. Une toile d’araignée apparait progressivement entre la caméra et la patiente qui s’y accroche avant que la toile ne commence à l’encercler puis (à travers une nouvelle coupe) se transforme en grillage circulaire emprisonnant la jeune femme comme dans une roue dont elle ne peut s’échapper. | Après une courte danse au milieu de ces formes flottantes, une troisième coupe positionne la caméra en plongée sur la jeune femme. Une toile d’araignée apparait progressivement entre la caméra et la patiente qui s’y accroche avant que la toile ne commence à l’encercler puis (à travers une nouvelle coupe) se transforme en grillage circulaire emprisonnant la jeune femme comme dans une roue dont elle ne peut s’échapper. (05:29) | ||
''récit-cadre'' | |||
Retour dans la chambre de la patiente. Elle tient dans ses mains un morceau de grillage qui disparaît progressivement. Elle poursuit sa narration : | |||
« Et j’ai été précipitée dans l’église, dans l’église de ma première communion. Les petites filles passaient sans me voir. Elles passaient comme des fantômes. J’étais la statue, le vitrail, la plante et l’ombre m’a saisi, entraîné dans la grotte… la grotte, refuge qui m’attirait et me repoussait. » | « Et j’ai été précipitée dans l’église, dans l’église de ma première communion. Les petites filles passaient sans me voir. Elles passaient comme des fantômes. J’étais la statue, le vitrail, la plante et l’ombre m’a saisi, entraîné dans la grotte… la grotte, refuge qui m’attirait et me repoussait. » | ||
Tout en continuant son récit, la patiente se lève et s’avance vers la fenêtre. | Tout en continuant son récit, la patiente se lève et s’avance vers la fenêtre. | ||
« Des nains en défendaient les parages. Des nains qui riaient et jouaient sans m’apercevoir. Au creux de la grotte, je trouvais l’enfant. Un lourd petit enfant sans yeux. Je lui faisais manger des nourritures douces et visqueuses. Alors, j’ai fouillé ses orbites vides, énucléant avec précision ses globes oculaires ronds comme des billes d’agate, rondes et glauques. Et je les ai fait tomber au fond du bocal où nageaient translucides d’autres yeux que j’avais arrachés autrefois. » | « Des nains en défendaient les parages. Des nains qui riaient et jouaient sans m’apercevoir. Au creux de la grotte, je trouvais l’enfant. Un lourd petit enfant sans yeux. Je lui faisais manger des nourritures douces et visqueuses. Alors, j’ai fouillé ses orbites vides, énucléant avec précision ses globes oculaires ronds comme des billes d’agate, rondes et glauques. Et je les ai fait tomber au fond du bocal où nageaient translucides d’autres yeux que j’avais arrachés autrefois. » | ||
S’éloignant de la fenêtre, elle s’arrête, un bras nonchalamment levé devant elle, l’autre tombant derrière, et se met sur la pointe des pieds. | S’éloignant de la fenêtre, elle s’arrête, un bras nonchalamment levé devant elle, l’autre tombant derrière, et se met sur la pointe des pieds. (07:22) | ||
''Tableau'' | |||
Par une coupe franche, le film nous emmène dans un nouvel espace très sombre et constitué d’une arche d’église et de trois vitraux, le tout posé devant un fond entièrement noir. Debout au milieu de l’arche, la jeune femme est figée dans la même position qui avait clos le plan précédent. Sa robe/blouse est cette fois tachée de rouge et de brun. Du hors-champ droit s’avance une procession de religieuses portant chacune un cierge. Un orgue joue une musique relativement enjouée en contrepoint avec l’ambiance visuelle plus sinistre. Les religieuses se positionnent en cortège et la jeune femme s’avance au sein de l’allée formée par les religieuses avant de s’arrêter vers l’une des figures encapuchonnées. Elle la touche et lorsque celle-ci se retourne, apparait sous le capuchon la patiente elle-même. Apeurée, la jeune femme se retourne et voit son reflet figé au sein d’un vitrail placé derrière elle. Composé de formes géométriques, le vitrail commence progressivement à se déstructurer, entraînant la décomposition de l’image du visage de la patiente qui se mêle au verre coloré ; contrechamp sur le visage de la jeune femme éclairé par des lumières colorées mouvantes, puis dédoublé verticalement et horizontalement, flouté, et enfin reflété dans un miroir brisé, le tout avec un fond sonore de musique concrète. Après un crescendo angoissant, la composition retrouve une certaine régularité tonale tandis que commencent à défiler plusieurs plans de la patiente reflétée dans une série de miroirs brisés qui fragmentent, une fois encore, son visage à la manière d’un tableau cubiste. Les deux plans suivants montrent le regard de la patiente directement face caméra, le reste de son visage d’abord occulté par un cache circulaire, puis par une couronne de feuilles d’arbres ne laissant apparaitre que son œil. | Par une coupe franche, le film nous emmène dans un nouvel espace très sombre et constitué d’une arche d’église et de trois vitraux, le tout posé devant un fond entièrement noir. Debout au milieu de l’arche, la jeune femme est figée dans la même position qui avait clos le plan précédent. Sa robe/blouse est cette fois tachée de rouge et de brun. Du hors-champ droit s’avance une procession de religieuses portant chacune un cierge. Un orgue joue une musique relativement enjouée en contrepoint avec l’ambiance visuelle plus sinistre. Les religieuses se positionnent en cortège et la jeune femme s’avance au sein de l’allée formée par les religieuses avant de s’arrêter vers l’une des figures encapuchonnées. Elle la touche et lorsque celle-ci se retourne, apparait sous le capuchon la patiente elle-même. Apeurée, la jeune femme se retourne et voit son reflet figé au sein d’un vitrail placé derrière elle. Composé de formes géométriques, le vitrail commence progressivement à se déstructurer, entraînant la décomposition de l’image du visage de la patiente qui se mêle au verre coloré ; contrechamp sur le visage de la jeune femme éclairé par des lumières colorées mouvantes, puis dédoublé verticalement et horizontalement, flouté, et enfin reflété dans un miroir brisé, le tout avec un fond sonore de musique concrète. Après un crescendo angoissant, la composition retrouve une certaine régularité tonale tandis que commencent à défiler plusieurs plans de la patiente reflétée dans une série de miroirs brisés qui fragmentent, une fois encore, son visage à la manière d’un tableau cubiste. Les deux plans suivants montrent le regard de la patiente directement face caméra, le reste de son visage d’abord occulté par un cache circulaire, puis par une couronne de feuilles d’arbres ne laissant apparaitre que son œil. | ||
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''Récit-cadre'' | |||
Regardant ses mains, la jeune femme continue sa narration : | Regardant ses mains, la jeune femme continue sa narration : | ||
« Je me regarde dans les glaces et c’est l’autre qui me sourit et qui m’embrasse. Ma peau s’effrite, se gaufre et je l’arrache par lambeaux. » | « Je me regarde dans les glaces et c’est l’autre qui me sourit et qui m’embrasse. Ma peau s’effrite, se gaufre et je l’arrache par lambeaux. » | ||
La patiente sombre à nouveau. Par un fondu au noir, le film retourne au récit enchâssé. | La patiente sombre à nouveau. Par un fondu au noir, le film retourne au récit enchâssé. (17:44) | ||
''Tableau'' | |||
Le nouveau décor rappelle la chambre d’hôpital tant par son carrelage en damier, que par l’angle du cadrage. Cependant, la chambre est maintenant peinte en rouge et noir et contient deux grands miroirs, un vertical, l’autre horizontal. Le lit et la fenêtre ont disparu. | Le nouveau décor rappelle la chambre d’hôpital tant par son carrelage en damier, que par l’angle du cadrage. Cependant, la chambre est maintenant peinte en rouge et noir et contient deux grands miroirs, un vertical, l’autre horizontal. Le lit et la fenêtre ont disparu. | ||
Regardant son reflet dans la glace, la patiente danse sur fond de musique jazz. La caméra se rapproche du miroir qui ne reflète rien. Soudain, glissant depuis la gauche, apparait la patiente allongée, avant qu’elle ne disparaisse, tout aussi soudainement, quand la jeune femme debout essaie de la toucher. Retour au plan large dans lequel la jeune femme fait quelques pas de côté pour aller vers le miroir vertical qui la reflète cette fois bel et bien. Un plan plus rapproché nous la montre dédoublée avant que le reflet traverse le miroir pour attraper la patiente par les épaules. Après une courte pause, la jeune femme s’éloigne du miroir et le reflet disparaît. Elle s’approche alors d’un plus petit miroir arrondi dans lequel apparait son visage. | Regardant son reflet dans la glace, la patiente danse sur fond de musique jazz. La caméra se rapproche du miroir qui ne reflète rien. Soudain, glissant depuis la gauche, apparait la patiente allongée, avant qu’elle ne disparaisse, tout aussi soudainement, quand la jeune femme debout essaie de la toucher. Retour au plan large dans lequel la jeune femme fait quelques pas de côté pour aller vers le miroir vertical qui la reflète cette fois bel et bien. Un plan plus rapproché nous la montre dédoublée avant que le reflet traverse le miroir pour attraper la patiente par les épaules. Après une courte pause, la jeune femme s’éloigne du miroir et le reflet disparaît. Elle s’approche alors d’un plus petit miroir arrondi dans lequel apparait son visage. De dos, en plan taille, elle se tient devant le miroir qui n’a plus de glace et a été remplacé par un fond rouge. Du bord gauche du cadre entre un double de la patiente qui semble léviter au-dessus de la jeune femme de dos. Le double se penche et embrasse la jeune femme sur la bouche. | ||
Une coupe renvoie vers un espace entièrement noir où la jeune femme, filmée en | Une coupe renvoie vers un espace entièrement noir où la jeune femme, filmée en plain pied, danse en arrachant progressivement de larges lambeaux de sa peau. Un plan plus serré la montre enlevant la peau de son cou. Une fois encore, les effets visuels — limités ici à de simples carrés de fausse peau sous lesquels le corps de la patiente est peint de manière rudimentaire pour imiter la chair — marquent clairement l’intention poétique et surréaliste des séquences enchâssées. En plan poitrine, la jeune femme commence à se caresser les bras et le cou de manière extatique, avant que la scène ne soit interrompue par un fondu au noir. (20:06) | ||
''Récit-cadre'' | |||
La jeune femme est assise à genoux sur son lit. Le cadrage suggère un changement dans la disposition de la chambre. Elle continue sa narration : | La jeune femme est assise à genoux sur son lit. Le cadrage suggère un changement dans la disposition de la chambre. Elle continue sa narration : | ||
« Et je me suis couchée ». | « Et je me suis couchée ». | ||
Elle se couche. | Elle se couche. | ||
« Et les draps sont devenus des vagues blanches qui m’ont enseveli dans un bouillonnement qui déferlait sur un lit d’or. Comme je le lui demandais, la morte est venue doucement, lentement. Elle a d’abord pris mon ventre qui s’est mis à grouiller, puis mes yeux. Et les noirs sont venus qui buvaient et dansaient autour de l’écrin de glace dans lequel ils m’avaient placée. Des noirs qui dansaient autour de la mort qui voulait leur parler et ne pouvait pas le faire parce qu’elle avait commencé à pourrir doucement. Ils l’ont jetée dans la mare où elle s’est mise à flotter très lentement sur l’onde calme et noire. Les nénuphars froissés soupirent autour d’elle. Sur le sable mouillé, sa chevelure dénouée dessine des serpents. » | « Et les draps sont devenus des vagues blanches qui m’ont enseveli dans un bouillonnement qui déferlait sur un lit d’or. Comme je le lui demandais, la morte est venue doucement, lentement. Elle a d’abord pris mon ventre qui s’est mis à grouiller, puis mes yeux. Et les noirs sont venus qui buvaient et dansaient autour de l’écrin de glace dans lequel ils m’avaient placée. Des noirs qui dansaient autour de la mort qui voulait leur parler et ne pouvait pas le faire parce qu’elle avait commencé à pourrir doucement. Ils l’ont jetée dans la mare où elle s’est mise à flotter très lentement sur l’onde calme et noire. Les nénuphars froissés soupirent autour d’elle. Sur le sable mouillé, sa chevelure dénouée dessine des serpents. » | ||
Dans le plan suivant, la chambre est filmée en plongée. Le médecin a disparu et la jeune femme est allongée dans son lit. La caméra zoome sur la patiente qui s’agite. Un drap blanc lui tombe dessus, faisant office de transition vers le récit | Dans le plan suivant, la chambre est filmée en plongée. Le médecin a disparu et la jeune femme est allongée dans son lit. La caméra zoome sur la patiente qui s’agite. Un drap blanc lui tombe dessus, faisant office de transition vers le récit enchassé. (21:56) | ||
Tableau | |||
Un zoom arrière révèle la jeune fille, allongée cette fois dans un lit paré de dorures dans une chambre dont l’architecture reprend celle de la chambre d’hôpital, fenêtre à barreau incluse. Cependant, les murs du nouveau décor sont recouverts d’un papier peint au motif floral, blanc et rouge. Un second plan recentre le cadre vers de la fenêtre barrée tout en faisant apparaitre la patiente de l’autre côté des barreaux. Un fondu transforme ensuite la fenêtre en petit miroir orné au milieu duquel apparait toujours le visage de la patiente. La caméra s’approche révélant les larmes qui coulent le long des joues de la jeune femme alors qu’une marche funèbre débute en arrière-fond. Par un panoramique vertical descendant, le plan suivant passe du mur au lit où repose la jeune femme qui porte maintenant un maquillage bleuté indiquant qu’elle est « morte », comme annoncé dans le récit-cadre. Un autre mouvement panoramique, horizontal cette fois, s’éloigne du lit et la dévoile allongée dans un cercueil ouvert, orné de draperies noires. Dans cet Athénée « surréaliste » entrent quatre hommes habillés de collants blancs, de frocs rouges et de chapeaux noirs. Leurs visages sont grimés en noir à la manière d’un Ministrel Show. Les hommes passent devant le cercueil en buvant, discutant et riant. Après avoir posé leurs verres, ils soulèvent le cercueil et l’emportent hors champ. | |||
Un zoom arrière révèle la jeune fille, allongée cette fois dans un lit paré de dorures dans une chambre dont l’architecture reprend celle de la chambre d’hôpital, fenêtre à barreau incluse. Cependant, les murs du nouveau décor sont recouverts d’un papier peint au motif floral, blanc et rouge. Un second plan recentre le cadre vers de la fenêtre barrée tout en faisant apparaitre la patiente de l’autre côté des barreaux. Un fondu transforme ensuite la fenêtre en petit miroir orné au milieu duquel apparait toujours le visage de la patiente. La caméra s’approche révélant les larmes qui coulent le long des joues de la jeune femme alors qu’une marche funèbre débute en arrière-fond. Par un panoramique vertical descendant, le plan suivant passe du mur au lit où repose la jeune femme qui porte maintenant un maquillage bleuté indiquant qu’elle est « morte », comme annoncé dans le récit-cadre. Un autre mouvement panoramique, horizontal cette fois, s’éloigne du lit et la dévoile allongée dans un cercueil ouvert, orné de draperies noires. Dans cet | |||
Le plan suivant relocalise l’action en extérieur (décor naturel), dans une forêt de nuit, où le cortège funèbre, maintenant équipé de torches, s’avance en direction de la caméra, puis la dépasse. La série de plans suivante montre la procession longeant un lac, se dirigeant vers un ponton et plongeant le corps de la morte dans l’eau. Remplaçant la marche funèbre par une mélodie bucolique, le plan suivant montre la jeune femme, flottant paisiblement dans la mare, son corps entouré de nénuphars. La lumière intense de la lune éclaire la scène à l’iconographie ophélienne. | Le plan suivant relocalise l’action en extérieur (décor naturel), dans une forêt de nuit, où le cortège funèbre, maintenant équipé de torches, s’avance en direction de la caméra, puis la dépasse. La série de plans suivante montre la procession longeant un lac, se dirigeant vers un ponton et plongeant le corps de la morte dans l’eau. Remplaçant la marche funèbre par une mélodie bucolique, le plan suivant montre la jeune femme, flottant paisiblement dans la mare, son corps entouré de nénuphars. La lumière intense de la lune éclaire la scène à l’iconographie ophélienne. | ||
''Récit-cadre'' | |||
La jeune femme est à nouveau allongée sur son lit d’hôpital. Elle continue sa narration : | La jeune femme est à nouveau allongée sur son lit d’hôpital. Elle continue sa narration : | ||
« Elle veut revivre, ressusciter, naître à nouveau. Elle cherche le sein, le bon sein qu’elle dévore pour prendre sa tiédeur qui la remplit. Mais le bon sein s’est transformé et le Pierrot funambulesque qui l’a pris à deux mains la menace. Elle voudrait s’en saisir pour le mordre et l’avaler. J’ai couru, dansé, couru après le Pierrot qui m’entraîne. Et je cours dans la boue fécale qui m’avale, m’aspire, m’absorbe. Et j’ai marché, dansé, marché, retrouvé le bon sein. | « Elle veut revivre, ressusciter, naître à nouveau. Elle cherche le sein, le bon sein qu’elle dévore pour prendre sa tiédeur qui la remplit. Mais le bon sein s’est transformé et le Pierrot funambulesque qui l’a pris à deux mains la menace. Elle voudrait s’en saisir pour le mordre et l’avaler. J’ai couru, dansé, couru après le Pierrot qui m’entraîne. Et je cours dans la boue fécale qui m’avale, m’aspire, m’absorbe. Et j’ai marché, dansé, marché, retrouvé le bon sein. | ||
Tout en parlant, elle se lève et quitte le champ. La scène continue dans le plan suivant où, devant la fenêtre, elle s’accroche aux barreaux et se laisse glisser vers le sol, puis remonte et quitte une fois encore le cadre. | Tout en parlant, elle se lève et quitte le champ. La scène continue dans le plan suivant où, devant la fenêtre, elle s’accroche aux barreaux et se laisse glisser vers le sol, puis remonte et quitte une fois encore le cadre. (27:58) | ||
''Tableau'' | |||
"Take Five" de Dave Brubeck dans la bande son. La jeune femme, en gros plan, s’avance vers un mur violet. Un plan plus large la montre habillée en combinaison de couleur chair, dansant aux pieds d’une femme, vêtue d’une jupe et d’un chemisier, assise devant un berceau en bois. Alors que la patiente s’avance à genoux vers la femme, un plan rapproché dévoile le sein de cette dernière qu’elle offre à la jeune femme. Un court insert montre alors un nourrisson tétant le sein en gros plan avant qu’une nouvelle coupe affiche le visage de la jeune femme couvert de lait. Après un retour sur l’insert du bébé, le plan suivant nous montre la jeune femme poursuivant un biberon géant tenu par un homme habillé en Pierrot. Ce dernier l’entraîne dans une danse jazz énergique au sein d’un décor à nouveau composé de murs rouges et d’arches rappelant le premier tableau. La jeune femme parvient à s’échapper hors champ. Toujours vêtue de sa combinaison couleur chair, elle court dans un champ fraîchement labouré. La musique symphonique évoque une scène de chasse ou une course-poursuite et met l’emphase sur les difficultés de la jeune femme qui tombe puis rampe dans la boue, tentant en vain d’avancer en direction de la caméra. | |||
''Récit-cadre'' | |||
Filmée en gros plan et à l’envers, la jeune femme, transpirante et essoufflée, continue sa narration depuis son lit d’hôpital: | Filmée en gros plan et à l’envers, la jeune femme, transpirante et essoufflée, continue sa narration depuis son lit d’hôpital: | ||
« Je cours et je me retrouve écartelée, ouverte… ouverte à tous sur la route qui… encore. Encore. Pour que je me dissolve dans l’infini de la nuit. » | « Je cours et je me retrouve écartelée, ouverte… ouverte à tous sur la route qui… encore. Encore. Pour que je me dissolve dans l’infini de la nuit. » | ||
Elle se calme, respire. | Elle se calme, respire. (31:02) | ||
''Tableau'' | |||
De retour devant l’entrée de la grotte, filmée en plan large, le décor est chaotique : une statue de cheval traine au milieu de déchets et un des nains est en train de vomir dans un sceau, pendant que deux autres dorment à ses côtés. La musique, plus entraînante et effrayante, renforce l’impression de chaos dramatique. Couchée sur une plateforme surélevée faite d’une roue de calèche et d’un tronc d’arbre, la jeune femme à la blouse tachée est étendue, immobile et amorphe. Du bord gauche supérieur entre alors la patiente dans un nouveau jeu de dédoublement. Elle longe le décor et s’arrête lorsqu’elle aperçoit son propre corps sur la roue qui se met à tourner sur elle-même. Le dernier plan zoome en plongée sur le corps de la jeune femme en mouvement avant qu’un fondu enchaîné ne la fasse disparaître, laissant sur la roue uniquement la blouse tachée de sang et de boue. La roue tourne de plus en plus vite et entraîne dans sa course le carton final qui apparait dans un fondu enchaîné : « FIN ». | De retour devant l’entrée de la grotte, filmée en plan large, le décor est chaotique : une statue de cheval traine au milieu de déchets et un des nains est en train de vomir dans un sceau, pendant que deux autres dorment à ses côtés. La musique, plus entraînante et effrayante, renforce l’impression de chaos dramatique. Couchée sur une plateforme surélevée faite d’une roue de calèche et d’un tronc d’arbre, la jeune femme à la blouse tachée est étendue, immobile et amorphe. Du bord gauche supérieur entre alors la patiente dans un nouveau jeu de dédoublement. Elle longe le décor et s’arrête lorsqu’elle aperçoit son propre corps sur la roue qui se met à tourner sur elle-même. Le dernier plan zoome en plongée sur le corps de la jeune femme en mouvement avant qu’un fondu enchaîné ne la fasse disparaître, laissant sur la roue uniquement la blouse tachée de sang et de boue. La roue tourne de plus en plus vite et entraîne dans sa course le carton final qui apparait dans un fondu enchaîné : « FIN ». | ||
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Version du 19 mars 2024 à 12:11
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Titre :
Ballet sur un thème paraphrénique
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Conseil scientifique :
Interprétation :
Durée :
33 minutes
Format :
Parlant - Couleur - 16 mm
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Archives détentrices :
Générique principal
Contenus
Sujet
Genre dominant
Résumé
Contexte
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Non.
- Images en plateau : Non.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Non.
- Animateur : Non.
- Voix off : Oui.
- Interview : Non.
- Musique et bruitages : Oui.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
Communications et événements associés au film
Public
Audience
Descriptif libre
Notes complémentaires
Références et documents externes
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Matthieu Dorner, Timothée Zurbuchen

