L'accouchement sans douleur, ASD
La méthode d'accouchement sans douleur, introduite dans les années 50 en France par le Dr. Lamaze, "consistait, par un enseignement approprié donné aux femmes enceintes, à analgésier leurs couches par une action essentiellement psychologique." (Marianne Caron-Leulliez et Jocelyne George, " L'accouchement sans douleur, histoire d'une révolution oubliée" ; éd. de L'Atelier, 2004, p.11). Venu de l'Union soviétique, l'ASD a d'abord été pratiquée dans une clinique appartenant à la CGT, il a également été promu par les cercles chrétiens, protestants aussi bien que catholiques : un discours du pape en 1956 a favorisé sa généralisation en France. Mais cette méthode s'est mal adaptée aux exigences des pouvoirs publics d'être systématiquement pratiquée en établissement hospitalier. "L'Accouchement Sans Douleur, qui repose avant tout sur une relation de confiance entre l'accoucheur et l'accouchée tout au long de la grossesse, est une pratique artisanale qui résiste mal à la division du travail liée à la concentration. La généralisation actuelle de la péridurale s'explique autant par cette évolution que par son indéniable efficacité anesthésiante." (Marianne Caron-Leulliez et Jocelyne George, p. 12).
L'action de Max Ploquin
Le film se déroule à Saint-Denis- de Jouhet où Max Ploquin, médecin gynécologue accoucheur, avait débuté sa carrière comme médecin généraliste de 1959 à 1964. Avec l'aide de sa première épouse Nicole, alors sage-femme, il avait incité les femmes enceintes du Boischaut à suivre une préparation théorique et pratique destinée à leur rendre la maîtrise de l'accouchement. Dans les six premiers mois, le couple réalisera une soixantaine d'accouchements, le plus souvent à domicile mais aussi dans la clinique Pasteur, à La Châtre. Le Dr. Max Ploquin a ensuite exercé à la clinique Montaigne de Châteauroux. Sa devise était : « Accoucher ici comme à la maison ». La liberté de la mère était respectée, comme ses désirs : liberté de mouvement, de choix, de présence et d’accompagnement d’amis et familiers, de mode d’accouchement, d’alimentation, etc. La préparation vise à permettre à la future mère de faire naître en respectant le plus possible la physiologie durant toutes les phases de l’accouchement. Laisser le bébé suivre son propre chemin dont il a une connaissance instinctuelle, une « pré-conscience », en le protégeant de toute intrusion dans son trajet, de toute manipulation, de toutes prises médicamenteuses maternelles intempestives susceptibles de troubler, de perturber son mouvement naturel.
La référence à Pavlov
Le film Accouchement sans douleur comprend un dessin qui fait référence au conditionnement de Pavlov. Cette image fait allusion à l'influence des théories de Pavlov dans l'approche de l'accouchement sans crainte en France après la Seconde Guerre Mondiale. Les premières mentions d’une méthode soviétique d’accouchement sans douleur apparaissent en France sous la plume du Dr Henri Zaidman, communiste et russophone. Ce médecin rédige dans des revues médicales, soit généralistes soit spécialisées en obstétrique, des synthèses d’articles parus en russe, comme ses confrères le font pour d’autres langues. Avant l’hégémonie de l’anglais en tant que langue scientifique, ces résumés de polyglottes assuraient la circulation des connaissances médicales. À partir du début de l’année 1950, Zaidman consacre plusieurs de ses synthèses à des techniques d’accouchement sans douleur faisant intervenir, à côté de substances analgésiques variées, une préparation psychique des femmes enceintes [21]. La première occurrence de l’expression « méthode psychoprophylactique » que j’ai rencontrée dans la littérature médicale francophone apparaît en 1951 dans une de ses courtes présentations. On y lit que cette « nouvelle méthode d’accouchement » mise au point par les accoucheurs russes en « se basant sur les théories de Pavlov sur le rôle primordial du système nerveux central sur toutes les réactions de l’organisme […] s’appelle psychoprophylactique parce qu’elle libère la femme des douleurs en empêchant leur genèse ». (VUILLE Marilène.
"L’obstétrique sous influence : émergence de l’accouchement sans douleur en France et en Suisse dans les années 1950". Revue d’histoire moderne & contemporaine, 2017/1 n° 64-1, p.116-149.)