Générique (00’00 – 00’10)
Le générique est composé d'une superposition de 4 prises de vues animées en noir et blanc dans des cadres. Elles représentent toutes des conduites addictives, de la prise d’alcool à la consommation de drogue. Les vidéos vont changer et leurs espaces de projection vont se réorganiser. Le fond sonore est plutôt angoissant, une sorte de Break de Jazz low tempo avec une nappe sans doute jouée sur un accord mineur qui donne une tonalité dissonante à la musique et accentue le côté angoissant du générique. Une animation fait le lien entre ces vidéos sous la forme d’une bande rouge qui serpente dans les différents cadres d’image. Cette animation revient sous une forme finale pour introduire le nom de la série « Accro ». Le nom de la série est inséré dans une forme arrondie constituée des bandes rouges qui serpentaient précédemment dans les images. Au centre de cette forme arrondie, sur le nom de la série tourne un serpentin rouge. Celui-ci pourrait représenter la spirale de l'addiction. Le message de la série serait ainsi symbolisé par plusieurs médiums dès le générique, les différentes images d'addictions puis pour lier toutes ces conduites addictives : le nom de la série et l'animation.
Approche globale sur l’injection : description de ses fonctionnements, de ses effets et des usagers (00’10 – 02’37)
Le film s’ouvre sur un gros plan d’une main fermée. Elle tient fermement une dizaine de seringues usagées et une cigarette de cannabis. « Injection » infographié bord-cadre gauche dans un imposant carré bleu. Gros plan sur une oreille, seringue posée dessus à la manière d’un architecte qui aurait son crayon sur l’oreille pour dessiner le plan. Insiste sur le caractère ostentatoire de l’acte. Exhiber une seringue c’est revendiquer son appartenance à un groupe d’usagers. Autres plans, d’injection, de préparation d’injection qui ont en commun la centralité de la seringue. Introduction au véritable rituel de l’injection. Avec ses codes et ses rites, ce mode de consommation est presque à lui tout seul une toxicomanie.
Interview de « MED » infographié bord-cadre gauche, plan épaule. À la différence des autres usagers interviewés dans les autres épisodes de la série, les informations disponibles sur lui ne comprennent même pas son âge. Il explique que « l’injection ce n’est plus de la toxicomanie, c’est de la picomanie. C’est juste le plaisir de se tanker une aiguille dans le bras ». Expression difficile, langage très familier, tics de langage. L’usager a le visage marqué par ses précédentes expériences toxicomaniaques. Semble venir du Sud-Ouest, le cadre ensoleillé, près d’une piscine choisie pour l’interview le suggère aussi.
Interview de « Sam, 40 ans », infographié en bord-cadre gauche, « plan épaule ». Expression plus fluide, gestuel saccadée : « l’injection c’est la voie royale pour le toxicomane ».
Interview de « Gilles, 46 ans », infographié en bord-cadre gauche, « plan épaule ». Visage marqué. Niveau de langage soutenu. Explique le recours à l’injection par un souci d’économie « le produit est extrêmement onéreux, pris en injection, il en faut beaucoup moins pour sentir le même effet ».
Les trois interviews qui se sont succédé ont introduit le spectateur aux ravages de l’injection, mais aussi à son universalité. 3 individus avec des profils socio-économiques différents, mais qui reflètent tous une réalité simple : les ravages de l’injection sur le corps humain.
Intervention du professeur Serge Hefez, en plan épaule. Écran divisé en 2. Sur l’espace à sa droite, on observe les plans illustrant ses propos à mesure qu’il les expose.
On apprend que l’injection, responsable de la diffusion des virus du Sida et de l’hépatite C s’est développée chez les usagers de drogues avec l’héroïne. L’injection directe dans la veine permet d’obtenir l’effet du « flash » : « explosion de bien être, montée instantanée d’un plaisir vertigineux que certains comparent avec l’orgasme ». L’usage de l’injection s’est ensuite généralisé avec d’autres drogues dans l’espoir d’obtenir « plus d’effets, plus vite, avec le minimum de produit ».
Serge Hefez insiste sur le caractère addictif du mode de consommation, au-delà du produit, c’est « l’injection elle-même qui devient un rituel obsédant ». On note le ton dramatique du présentateur, fait rare pour une série qui tendait à donner une vision neutre et équilibrée des produits et enjeux. Le changement de ton reflète la dangerosité extrême de ce mode d’injection et les conséquences rapides et irrémédiables qu’il possède : « dans cette quête éperdue de la jouissance, les veines se mettent rapidement hors d’usage et la recherche effrénée d’une voie veineuse conduit à des tortures et mutilations qu’on ne pourrait imaginer dans les pires cauchemars ».
Interview de Sam, plan épaule, plus qu’une mode, il compare sa prise de drogues par injection avec « un mode de vie totale ». Toute sa vie était ainsi réglée en fonction de sa consommation. Différence avec les autres drogues ou l’on observe une désocialisation et un isolement progressif, caractère immédiat de la reconfiguration du mode de vie lorsqu’on constate une prise de drogue par injection.
Des exemples quantitatifs viennent renforcer le message de la dangerosité de l’injection. Des images d’animation apparaissent ainsi que des informations chiffrées en infographie. Les infographies nous apprennent que les Français sont parmi les populations les plus touchées par le problème de l’injection en Europe. On apprend que 14 millions de seringues ont été vendues pour usage de drogues en 1997. Chiffres démontrent une stabilisation de la population d’injecteurs.
Les effets physiologiques de l’injection (02’37 -05’17)
Interview de Sam, plan épaule, explique que l’injection permet que « le produit vous submerge et vous procure une sensation de plaisir incroyable ».
Interview de Gilles, plan épaule. Infographie, bord-cadre droit en lettres capitales : « qu’est-ce que ça fait ? », en plus petit, au-dessus « effets psychologiques ». Il explique le fait social que devient l’injection : « Il existe certains fétichistes de l’injection, le plaisir de se faire un trou dans les veines représente finalement l’essentiel ».
Intervention de Serge Hefez, plan épaule. Des animations qui illustrent ses propos défilent à sa droite. L’effet du flash devient de plus en plus rare, mais les usagers conservent « toutes les sensations et les gestes qui entourent l’injection elle-même. Il semble que pour certains usagers, ce qui compte avant tout est lié à cette perception-là, l’aiguille, le trou dans la peau ».
Interrogations sur la portée psychique et symbolique de cette quête de « perforation corporelle » représente pour l’individu. Association plaisir/douleur. La douleur de la perforation précédant systématiquement l’effet du flash, les usagers peuvent associer les 2 sensations, ils recherchent le plaisir dans la douleur de la perforation. Perméabilité de la barrière qui sépare le plaisir de la douleur.
Interview de « MED », plan épaule, infographie bord-cadre droit « qu’est ce que ça fait » en lettres capitales. Insiste sur le fait que « quand l’aiguille, elle est dans la veine, c’est déjà une sorte de sensation, après c’est le produit qui vient par-derrière ». Vocabulaire à évocation sexuel. L’image utilisée dote le produit d’une connotation sexuelle. Il pénètre l’usager pour lui procurer le flash, associé à un orgasme.
Les risques de l’injection (05’17 – 06’50)
L'animation occupe tout l’écran, décrit les risques en simulant de manière schématique les infections et maladies causées par l’injection. Apparition d’abcès, déformation des veines, phlébites. L’usager cherche désespérément des veines disponibles au point de se piquer dans la verge ou au cou. Les risques infectieux sont très nombreux aussi : endocardite, septicémie. La voix off continue de décrire les conséquences possibles de l’injection : « poussière » montée brutale de fièvres due aux produits coupants, overdose, coma généralisé dû à une dose trop élevée. Risques élevés d’infections : hépatite C, Sida.
Intervention de Serge Hefez, plan épaule. L’exemple de l’injection souligne « l’importance des rituels de consommation dans la genèse de la toxicomanie, le besoin de drogues s’enracine tout autant dans des habitudes, des environnements que dans l’effet des produits eux-mêmes ».
Comment réduire les risques (06’50 – 11’10)
Interview de Sam, plan épaule. Il témoigne du déséquilibre et de l’état d’anxiété de l’injecteur avant de faire son shoot : « quand vous êtes en manque, vous êtes pressé de faire votre shoot ». Face à l’excitation provoquée par la perspective du shoot ou l’anxiété due au manque, l’usager oublie les précautions élémentaires. L’interviewé finit en expliquant qu’à cause d'une non-observation des précautions d’usage « il y en a tellement qui se retrouve HIV (atteint du Sida) ». Regard vers le bas, mine triste, faux sourire gêné. On sent que l’interviewé a réactivé des souvenirs douloureux, sans doute liés à ses connaissances touchées.
Immersion dans un programme d’échange de seringue qui vient en aide aux usagers les plus dé-insérés. Vue de la clinique en contre-plongée. Plan large, bâtiment blanc sur ciel bleu avec volets bleus. Bâtiment dégage une impression de réconfort. Plan fixe d’une dizaine de secondes. Le bâtiment apparaît comme une métaphore de l’aide qu’apporte le corps médical, le personnel de cette clinique aux injecteurs. Renvoie une vision de la médecine apaisée et universaliste, transcende les différences au niveau des usagers, de leurs conditions pour apporter des solutions à l’ensemble de la population, même les plus fragiles, éloignés et rejetés par la société.
Description des « kits » distribués aux usagers pour qu’ils puissent s’injecter avec du matériel neuf et stérile afin de limiter le risque de contamination infectieuse. Les kits contiennent des seringues, des préservatifs, des tampons alcoolisés et une stericup, un contenant stérile qui évite le partage de la petite cuillère.
Interview de « Jimmy Kempfer, coordinateur », infographié bord inérieur cadre droit.
Il explique que les usagers ont compris le problème de la transmission de seringue et que celle-ci diminue. La voix off explique que ces services sont « en première ligne ». Plan sur le coordinateur, il ouvre son véhicule et monte dans le minibus de l’association. Plan qui fait penser à un soldat partant la guerre, image renforcée par la métaphore du champ de bataille utilisée avant. La lutte contre l’injection apparaît donc comme une « guerre ». Guerre non pas contre les usagers, ni même la drogue, mais contre l’injection qui devient une drogue à elle toute seule.
Interview d’« Anne Coppel, responsable du programme », infographié bord inférieur cadre droit. L’objectif poursuivi est de responsabiliser l’usager pour que dans l’échange, les usagers puissent trouver des solutions adaptées à leur situation. Les usagers peuvent assister à une explication des gestes à faire pour limiter les risques, de comment jeter sa seringue pour que personne ne se blesse avec et puisse attraper le VIH… In fine, la réduction des risques est une « politique humble qui permet aux usagers de modifier leurs pratiques, le regard des autres sur eux et favorise un comportement citoyen ». Plan large sur 2 usagers qui sortent du minibus, la femme court pour rejoindre son compagnon. Il s’éloigne, dos à la caméra, fond lumineux de ville. Plan qui passe de l’usager dans le minibus à l’usager seul dans la rue. Vision métaphorique du lien, de l’aide apporté par l’association, mais l’usager reste libre ses propres choix. Accompagnement, responsabilisation, mais le choix d’arrêter l’injection doit venir de l’usager lui-même. Sa compagnonne peut être vue aussi comme l’aide essentielle qui doit être apportée par les proches. Faisceau d’informations qui montre que l’usager n’est pas seul, des personnes sont avec lui pour l’aider. Par contre, il est important de limiter au maximum sa capacité de nuisance pour la société d'où l’intérêt aussi de développer la responsabilité de l'usager grâce à la prévention, importance du "comportement citoyen". Grâce à une vision apaisée des acteurs du corps social, l’usager se sentira moins stigmatisé et ainsi aura sans doute plus de chance de ne pas se dérouler jusqu’au bout de sa pente funeste. Intervention du professeur Serge Hefez, il amplifie l’importance d’offrir des structures d’accueil adaptées à ceux qui se sont exclus à cause de leur toxicomanie.
Les conséquences judiciaires (10’35 – 11’10)
Aspect préventif mis en avant. Ce n’est pas les peines encourues pour prise ou revente de drogues qui sont évoquées, mais les lois qui ont libéralisé la vente de seringues. Par exemple, la distribution gratuite des seringues dans le cadre de la lutte contre le Sida est permise dans le cadre du décret du 7 mars 1995.
Épilogue (11’10 – 12’00)
Interview de Sam, plan épaule. Expression en vogue chez les toxicomanes : « piquer du nez ». Double jeu de mot sur l’avion qui pique du nez quand il va s’écraser, mais aussi sur le lieu de la possible piqure après que toutes les veines soient devenues inutilisables. Signifie l’état « de déchéance » d’un toxicomane qui ne fait plus attention à la vie et se sent doucement glisser…
Intervention de Serge Hefez, plan épaule. La médiatisation des cas extrêmes de toxicomanes décharnés et couverts de cicatrices ont polarisé l’opinion publique et augmenté d’autant le rejet des toxicomanes. Les résultats des études empiriques ont pourtant montré que l’accès facilité aux matériels d’injection a largement contribué à la baisse des contaminations et que les usagers sont très sensibles aux message de prévention.