"Gueux, malades et miséreux"
Drones inquiétants en musique de fond. Carton avec mots en blanc sur fond noir : "Les hôpitaux" ; puis, en clignotement autour de "les hôpitaux", les noms de "Brabant" et "Pottecher" ; puis les mots "aujourd'hui" et "la maison des pauvres". Salle de musée, des gravures de portraits ou de vues de bâtiments mises sous verre sous forme de plaques en tourniquets ou de meubles présentoirs. Un homme les considère tour à tour, on reconnaît le journaliste Frédéric Pottecher. Il s'arrête devant l'une d'elles. Zoom sur l'image en question qui montre une salle commune d'hôpital, avec son poêle au centre de la pièce, et des individus maigres et souffreteux dans ses lits. Autre gravure zoomée sur laquelle est représentée une cour fermée de bâtiments sur laquelle des hommes en uniforme maltraitent des hommes dans des tuniques grises. L'homme lit tout haut le cartel correspondant : "Ferrement des condamnés aux galères à Bicêtre en 1791." Ces deux images choisies parmi toutes celles exposées témoignent de deux usages de l'hôpital : l'accueil des pauvres et le traitement carcéral de condamnés par la Justice. Pottecher se penche pour lire la notice : "Bicêtre fut pendant deux siècles un véritable caravanserail, à la fois hospice, asile de fous et d'épileptiques, hôpital pour traitements des vénériens et prison." Pottecher, continuant la lecture, cite les hôtes célèbres de Bicêtre : le Marquis de Sade, Vidocq, Ange Pitou. Plein cadre sur une toile montrant des enfants priant avec une religieuse. Lecture du cartel par Pottecher en off : "la prière des teigneux, 1853, acquis par l'impératrice Eugénie, Trousseau." Pottecher continue sa visite, un conservateur lui montre une boîte qui contient les instruments de trépanation de Dupuytren, en extrait un vilebrequin et le trépan auquel il s'ajuste, puis deux scies, puis un bistouri terminé par une boule qui lui permettait de "glisser sur le cerveau". Pottecher commente ses explications de "Ah oui" songeurs. Sur une gravure plein cadre montrant des patients dans une salle commune, au corps étique et grimaçant de misère et de mal-être, le commentaire précise que plusieurs hôtel-Dieu ont été mises en place au VIIe siècle en France. Sur d'autres images montrant les ravages de la Guerre de Cent ans, évocation de l'élévation des hospices de Beaune, "premier hôpital moderne". Son fondateur, Guillaume de Salin, prévoit d'y accueillir "les gueux, les malades, les miséreux" que les tueries massives et les destructions des conflits ont fait venir de toutes parts dans la ville. Le premier hôte y est pris en charge en 1442. Une voix psalmodie en latin, vues sur la salle commune avec lits aux rideaux et petite table à double plateau supportant un pichet et différents récipients en métal. Les plans sur les lits alternent ceux d'un crucifix et d'un vitrail d'église : l'hôpital est d'abord un lieu religieux où ce sont les âmes qui, avant tout, sont prises en charge. (05:51)
"Franz Hals? Rembrandt? Non, l'hôpital aujourd'hui..."
Travelling en contreplongée sur une façade de bâtiment, montrant une galerie surmontée d'un toit rythmé par des chiens assis. Son criard de cloche. Le commentaire explique qu'au XIIIe siècle, des léproseries et des hôtel Dieu se sont multipliées en France, "toutes ces fondations étaient entre les mains des religieux et vivaient uniquement de dons". Peintures médiévales montrant les premiers types de soins : trépanation, auscultation, la saignée, le clystère. L'application du clystère est représentée par une peinture flamande. Succède à la vue de cette peinture la prise de vue actuelle d'une chambre commune. Vaste espace bordé de lits à rideaux à la mode médiévale, avec en son centre, un poêle et une grande table en bois. Des chaises en bois sont rangées contre, un bouquet de fleurs sur son plateau. Au fond de la pièce, l'âtre d'une cheminée, des fresques sur les murs. Pottecher : "Ces deux images se ressemblent. Franz Hals? Rembrandt? Non, l'hôpital de Beaune, tel qu'on y vit encore aujourd'hui, en 1967." Le plan fixe est prolongé par un panoramique puis un travelling qui portent le point de vue vers des patients âgés, assis ou alités, dans une attitude de prostration. Autre travelling dans une autre pièce commune avec une fontaine et sa vasque, qui pivote sur une infirmière nourrissant un vieil homme à la cuillère. Et c'est vrai que cette succession de plans donne l'impression que c'est une imagerie hospitalière de la Renaissance qui s'anime. "Beaune est intact, c'est le témoignage des cinq premiers siècles de l'histoire des hôpitaux." Vue sur une façade de grand bâtiment du XIXe siècle qui, par un panoramique, se prolonge par la vue sur un bâtiment moderne. Succession d'entretiens de médecins qui reviennent sur l'introduction et la fonction de leur profession au sein des hôpitaux. Les premiers médecins y apparaissent avec la révolution française, comme Corvisart (Jean-Nicolas Corvisart). Le patient qui y était accueilli était pauvre : "Il était honteux d'y aller". L'hôpital était le lieu où "on allait mourir". Un des médecins interrogés (pas nommé) se souvient que dans son enfance, l'hôpital Broussais était surnommé "Broussais la mort". Les tuberculeux y "mouraient comme des mouches car il n'y avait aucun moyen de les soigner". Avec un sourire, il ajoute : "c'était affreux, mais tout cela est transformé". (09:32)