Un film d'enseignement
À peine le cinématographe est-il né que l’enseignement s’y intéresse. Dès 1896 est créé au Musée pédagogique (qui lui-même date de 1879) le service central des projections lumineuses avec une section de vues fixes. Après la Première Guerre mondiale est mise en place une commission extraparlementaire « chargée de rechercher les meilleurs moyens de généraliser l’utilisation cinématographique dans les différentes branches de l’enseignement ». Composée de parlementaires, de directeurs et d’inspecteurs de l’enseignement, de professeurs et d’industriels (67 membres), la commission rend en 1920 un rapport favorable. Au même moment, certaines municipalités encouragent la diffusion sur place de ce matériel éducatif et mettent en place des offices du cinéma éducateur : Strasbourg (1920), Lyon et Marseille (1921), Saint-Étienne (1922), Nancy (1923).
Le cinéma d’enseignement s'épanouit dans la période couvrant les années 1930 jusqu'aux années 1970. A partir de cette date, il doit affronter la compétition de la diapositive et de la télévision.
Le cinéma d’enseignement est à différencier du cinéma éducateur. Le cinéma d’enseignement destiné à la classe, montré par l’instituteur, accompagne la leçon, l’illustre en quelque sorte, tandis que le cinéma éducateur bien que le plus souvent projeté dans l’école, est diffusé hors temps scolaire et peut être le fait d’un instituteur ou de conférenciers spécialisés (agriculture, santé, etc.). L’émergence du film parlant, qui a réellement mis fin au cinéma d’enseignement et d’éducation en raison de l’augmentation de ses coûts et parce qu’il venait occulter la parole du conférencier, maître ou éducateur, a favorisé l’émergence du film-fixe.
Le CNAM et André Didier
La mission du CNAM, développée et établie au cours du xixe siècle, consiste à la fois à assurer une formation technique supérieure pour des professionnels de tous niveaux et promouvoir l’innovation et les sciences dans leurs applications industrielles. André Didier, auteur du film, a mis en oeuvre cette mission tout au long d’une carrière qu’il commence en 1934 comme préparateur adjoint à la chaire de physique générale, dirigée alors par le professeur Jules Lemoine, et qu’il poursuit au sein du Centre de production des films scientifiques et techniques de l’établissement, puis dans la chaire de technique d’enregistrement, de transmission et de reproduction du son et des images », comme aide technique du CNRS d’abord, ingénieur « chef de travaux » ensuite, et enfin professeur titulaire de chaire.
Dans les années 1920, le CNAM devient le lieu éphémère d’un cinéma savant, fait dans et pour les laboratoires, qu’ils soient scientifiques ou industriels. Didier y expérimente les techniques d’enregistrement du son et des images. Il collabore avec Marc Cantagrel, réalisateur du film, grâce à l’intermédiaire de Jules Lemoine. Il participe à la réalisation de deux films (Le gyroscope et La force centrifuge), puis, au sein du Centre de production de films scientifiques, il se forme à la prise de vues, assure l’entretien des appareils et réalise plusieurs films pour des entreprises. Il travaille aussi au perfectionnement d’un amphithéâtre du Cnam dans lequel est expérimenté l’emploi de techniques audiovisuelles à des fins pédagogiques.
EN 1946, André Debrie remplace Gaumont au conseil de perfectionnement du Cnam. Painlevé, cependant, met en place la Commission supérieure technique (CST), dont les missions recoupent celles du conservatoire. (Cf. Robert Nardone, Loïc Petitgirard et Catherine Radtka, "Du Conservatoire national des arts et métiers à la mission ethnographique Ogooué-Congo, et retour - André Didier et l’expérimentation technique", Revue d'Histoire des Sciences Humaines, p. 65-91).